« J’aimerais, mais je ne peux pas. » Cette phrase vient, lancinante complainte, rythmer les six épisodes de la troisième saison d’Hippocrate. Et résume à elle seule le dilemme du service d’urgence au cœur de la série médicale de Thomas Lilti.
Olivier, le chef, aimerait sortir une ambulance pour secourir un toxicomane en overdose. Mais il ne peut pas. Pas les bras, pas l’argent. Alyson, la jeune interne maladroite de la saison 1 désormais plus assurée, aimerait garder ses patients angoissés toute la nuit. Pas la place. Même Hugo, le futur médecin empathique et sensible, n’a plus la possibilité de l’être comme il le voudrait, pressé entre le manque de lits et de collègues.
Alors que la saison 2, tournée pendant le Covid, apparaissait presque comme le docu-fiction préquel de l’épidémie, qui n’était mentionnée qu’à la toute fin du dernier épisode, cette saison 3 en explore les conséquences. Tous les dysfonctionnements évoqués précédemment trouvent leur triste aboutissement : un hôpital au bord du gouffre, ne tenant qu’au zèle de professionnels exsangues.
La force d’Hippocrate tient à sa mise en scène à la fois fluide et nerveuse, qui épouse l’alternance scénaristique des moments de tension extrême (la scène d’ouverture avec l’intervention houleuse d’Alyson dans une cité) et d’autres plus intimes, l’exceptionnel nécessaire à la tension dramatique (une grève, une mort) et la banalité du quotidien d’un service hospitalier. Mais elle est surtout l’œuvre d’un collectif.
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En trois saisons, Thomas Lilti a su constituer une véritable troupe de comédiens et comédiennes formidables (Bouli Lanners, Alice Belaïdi ou Louise Bourgoin) qui incarnent tous des personnages d’une rare justesse. Ce faisant, il parvient à traduire le sport de combat à plusieurs qu’est l’exercice de la médecine aujourd’hui et, face aux errements politiques qui conduisent à tant de souffrance, esquisse la possibilité d’une rébellion.
Hippocrate de Thomas Liti, saison 3, disponible sur Canal+
Images © Denis Manin – 31 Juin Films – Canal+