« Douglas Is Cancelled » : une satire mordante sur le rapport à la vérité

Entre satire et huis clos, cette comédie britannique grinçante signée Steven Moffat (créateur de la série « Sherlock ») s’empare avec virtuosité de la problématique des dénonciations des violences sexistes et sexuelles sur les réseaux sociaux. En plaçant son intrigue dans le milieu des médias, « Douglas is Cancelled » interroge notre rapport à la vérité et au pouvoir.


douglas is cancelled
"Douglas is cancelled" (c) Sally Mais / BBC Studios / Ha

À la télévision, tout est réuni pour que s’expriment les pires vices des individus : des caméras qui annihilent toute tentative d’honnêteté, le pouvoir qui fait tourner la tête (ou, pire encore, l’illusion d’avoir un pouvoir suffisant pour perdre la sienne) et l’obligation d’aller vite plutôt que de faire les choses bien. C’est donc logiquement là qu’on retrouve aussi les ingrédients d’une bonne comédie comme Douglas is Cancelled  : des ego surdimensionnés, des quiproquos en pagaille et un rythme bondissant.

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Steven Moffat, scénariste britannique, notamment créateur de Sherlock, a décidément bien choisi le décor de sa dernière satire, Douglas Is Cancelled. Son protagoniste est un présentateur de chaîne d’info, du genre mâle blanc rassurant pour une audience vieillissante, partageant l’antenne avec Madeline, du genre tout aussi blanc mais plus jeune et plus joli. Lorsqu’un tweet accusant Douglas d’avoir commis, ivre, une blague sexiste à un mariage devient viral, le studio tremble. La star de l’info britannique pourrait-elle disparaître dans les limbes de la cancel culture ?

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Douglas Is Cancelled ressemble d’abord à de la belle ouvrage un peu prévisible, fait de dialogues acérés, d’une troupe de comédiens excellents (surtout Hugh Bonneville, le patriarche de Downton Abbey) et d’un plaisir visible à s’attaquer aux obsessions contemporaines, de la dictature des réseaux sociaux au choc des générations, incarné ici par Douglas et sa fille, étudiante et activiste féministe.

Mais l’art d’une bonne série est surtout celui de la relance. À mi-parcours, le ton change brutalement, la sitcom devient huis clos et les rires s’étouffent alors qu’on s’éloigne des projecteurs. La série se révèle alors pour ce qu’elle est : une dissection féroce des petites bassesses des uns et des autres et un drame puissant sur le détournement du langage, donc de la vérité, qui permet à un système profondément inégalitaire de perdurer.

disponible sur arte.tv