« Leurs enfants après eux » des frères Boukherma : fureur adolescente

[CRITIQUE] Les frères Boukherma (« Teddy ») surprennent en adaptant le best-seller et prix Goncourt de Nicolas Mathieu, récit d’une adolescence vosgienne à la violence sociale omniprésente. Et trouvent la juste émotion dans le regard de leurs comédiens (extraordinaires Paul Kircher et Angelina Woreth).


Ça commence par un panorama montagneux, celui des Vosges, ses forêts à perte de vue et ses grands lacs. Dans l’eau claire, une cigarette fume ses dernières volutes ; manière de dire qu’on n’est pas là pour admirer le paysage. Le film a d’autres desseins, moins aimables ; ceux de raconter les enfants de la désindustrialisation, leur ennui et même leur désespoir.

À l’été 1992, Anthony (Paul Kircher) n’a pas 16 ans mais il fait beaucoup plus. Rien à foutre, il roule avec la bécane fraîchement piquée à son père ; c’est qu’il a rencontré Steph (Angelina Woreth) et qu’il se tuerait pour la rejoindre.

 

On n’attendait pas des frères Boukherma, sacrés petits prodiges du genre français avec Teddy (2021), qu’ils adaptent la prose très naturaliste de Nicolas Mathieu. Sous leur caméra, Leurs enfants après eux devient malgré tout un pur film de genre ; un film du genre à vous glacer le sang. On peut regretter l’accent mis sur la pulsion de mort et le cycle parfois redondant de la vengeance, sur un mode volontiers sensationnaliste – pourquoi dramatiser à l’extrême ce qui grouille déjà dans le cadre ?

L’émotion, la vraie, le film la tient pourtant sans forcer, chez deux jeunes comédiens comme deux trésors d’intensité. Il lui suffit d’observer Paul Kircher et Angelina Woreth, d’ajuster son rythme à leurs yeux et alors plus rien n’existe ; plus rien si ce n’est qu’on danse avec eux le requiem d’une génération.

Leurs enfants après eux de Ludovic et Zoran Boukherma, Warner Bros. (2 h 16), sortie le 4 décembre