« J’espère que tu vas mourir », « T’es juste une grosse criss de charogne », « Grosse merde »… Voilà quelques exemples d’insultes reçues par Safia Nolin en ligne. Connue pour sa pop douce, ses notes vocales éthérées accompagnées à la guitare, cette autrice-compositrice-interprète québécoise met ici en scène le cyberharcèlement misogyne, lesbophobe, grossophobe et raciste qu’elle vit au quotidien.
Dans un décor aux tapis colorés chaleureux, du Québécois Philippe Cyr, cette pièce entend sublimer ce déferlement de haine (vingt-cinq mille mots ont été collectés en ligne comme base de données pour le spectacle) à travers un chœur aux visages cagoulés. Alors que les insultes et menaces de mort, devenues morceaux de musique et harmonies, frappent par leur violence, Safia Nolin tient bon, encaisse le choc, sans jamais faillir face aux chanteurs et chanteuses, accompagnée par son alter ego incarné par la chanteuse Debbie Lynch-White.
Un exercice aussi masochiste que courageux, réponse universelle à la haine et dénonciation plus spécifique de l’acharnement contre les personnes publiques qui ne se conforment pas à la norme. La chanteuse reprend à son compte l’essai du philosophe Michel Foucault Surveiller et punir, sauf qu’ici ce n’est pas la prison qui contraint les corps, mais une parole débridée et souvent impunie, qui heurte dans la chair.
Elle touche non seulement sa cible, mais aussi tous ceux qui lui ressemblent, les intimant de se tenir sages, de ne pas prendre trop de place. Le timbre envoûtant et les textes poétiques de Safia Nolin apparaissent alors comme une belle résistance à cette violence en esquissant une solidarité possible.
: Surveillée et punie, aux Plateaux sauvages, du 16 au 18 janvier
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