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Tout premier long métrage haïtien, Haitian Corner s’ouvre sur des récits de tortures. Une femme et deux hommes disent, plein de calme et de dignité, les horreurs qu’ils ont subies durant leur emprisonnement sous la dictature de François Duvalier à Haïti. S’ensuit le générique, sur une douce chanson à la guitare : “Vive l’opposition”. Et nous voilà à New York, dans le café Haitian Corner, repère des Haïtiens exilés, discutant dans un dialecte chantant dont on reconnaît quelques mots : le créole haïtien.
On suit Joseph, emprisonné sept ans dans son pays, qu’il a fui pour échapper à ces horreurs. Le spectateur est encore marqué par les récits du début. Lui, qui les a vécus, est quotidiennement hanté par ces traumatismes. Régulièrement, un regard, un mouvement, le replonge subitement dans son cauchemar. Quand il retrouve son ancien bourreau à New York, il vomit. Et décide alors de se venger.
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Raoul Peck n’a pas choisi de faire de son film un simple thriller. Il ne réalise pas non plus un documentaire, et refuse l’appellation de “cinéaste engagé”. Celui qui deviendra ministre de la culture d’Haïti veut seulement “pouvoir regarder ses compatriotes dans les yeux”.
Lui aussi a vécu, enfant, la dictature. Son père a été arrêté plusieurs fois avant de s’exiler au Congo. Étudiant en Allemagne, Raoul Peck réfléchit à aller combattre la dictature Duvalier. Son premier long métrage, Haitian Corner, est finalement sa part au combat, aidé par sa mère qui tape le scénario à la machine à écrire.
Au programme également :
Figure de l’antiracisme et de l’anticolonialisme, Raoul Peck déploie une réflexion passionnante sur les violences raciales et l’invisibilisation des œuvres des artistes noirs. Revivez gratuitement la ciné-conférence événement Black Art Matters : Mémoire noire et Photographie, qu’on est allé filmer pour vous.
Le cinéaste nous a aussi confié une précieuse archive, où il raconte comment sa mère, Gisèle, a initié sa filmographie.
Et Sandrine Kiberlain joue l’illustre comédienne Sarah Bernhardt dans un biopic sorti hier au ciné. Devinerez-vous le film mystère de la semaine, magnifique cri d’amour au théâtre et à ses artifices avec Sabine Azéma, Fanny Ardant, Pierre Arditi ?