L’expo du mois : « Science/Fiction. Une non-histoire des plantes » à la MEP

Déprécié par les humains qui lui préfèrent les animaux, le monde végétal est loin d’avoir révélé tous ses secrets. Les plantes ont beau être privées de voix, elles n’en sont pas moins douées d’intelligence, comme en témoigne cette exposition riche en visions poétiques.


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Ágnes Dénes, Wheatfield – A Confrontation_ Battery Park Landfill, Downtown Manhattan – With Ágnes Dénes Standing in the Field (Champ de blé - Une confrontation _ Battery Park Lanfill, Downtown Manha (1)

Si les plantes manifestent leur sensibilité avec moins d’expressivité qu’un labrador, cela n’enlève rien à leur capacité de communication. C’est ce que s’évertue à démontrer la science depuis le début du XIXe siècle. Privilégiant les photographies – des cyanotypes d’Anna Atkins jusqu’à la pointe du numérique –, l’exposition retrace les principaux jalons de la botanique, puis s’ouvre aux spéculations fictionnelles, de romans de science-fiction à l’art vidéo, sans négliger le cinéma d’épouvante. En rupture avec l’anthropocentrisme propre à la société occidentale, cette « non-histoire » suggère une perspective animiste, selon laquelle la symbiose avec le vivant serait la clé pour façonner l’avenir. Réalisée par l’artiste Agnieszka Polska à l’aide d’une I.A., la vidéo The Book of Flowers entreprend de méditer sur un avenir hypothétique dans lequel les plantes auraient fusionné avec les humains pour donner naissance à une nouvelle civilisation.

Dans une salle annexe, le beau court métrage A Symphony of Silence de Philippe Roux, filmé à ras d’humus, révèle le grouillement organique d’un sous-bois où un corps humain fusionne avec le biotope. On peut également admirer les fleurs sauvages saisies par Almudena Romero comme celles du photographe expérimental Pierre Joseph, les fossiles en céramique de Sam Falls ou les topographies hybrides de Peter Hutchinson. Mais aussi les merveilleux films scientifiques vintage de Percy Smith, mis en musique par Stuart Staples. Plus perturbants, les « rayogrammes » d’Anaïs Tondeur révèlent la radioactivité de végétaux collectés aux abords de Tchernobyl. Enfin, une série de photographies témoigne du projet fou d’Ágnes Dénes, artiste hongroise de land art, qui transforma en 1982 une décharge de 8 000 m2 à la pointe de Manhattan en un champ de blé fertile. Choyez la chlorophylle, elle vous le rendra au centuple.

à la Maison européenne de la photographie, jusqu’au 19 janvier