« Les vivants » : le premier roman réussi d’Ambre Chalumeau

Premier roman vif, drôle et émouvant de la chroniqueuse culture de « Quotidien », « Les vivants » raconte la vie quand tout vacille.


Les vivants d'Ambre Chalumeau
Les vivants d'Ambre Chalumeau

Ça aurait pu s’appeler Bonjour tristesse. Mais Les vivants porte bien son nom. Car même s’il est question d’absence, d’hôpital, de ce qui blesse et ne se répare jamais tout à fait, Ambre Chalumeau écrit du côté de la vie. De tout ce qui nous percute, en même temps, sans trop prendre de gants, entre le meilleur et le pire, le trivial et le sacré, l’ordinaire et les moments qu’on n’oubliera pas.

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Et tout démarre comme ça : une fête, des jeunes gens, la musique, les verres, les rires et un coup de téléphone qui annonce un drame. En quelques lignes, Diane et Cora deviennent malgré elles les héroïnes d’une histoire qui n’est même pas la leur. Simon, leur ami d’enfance, est dans le coma. Il n’y a rien à faire, juste attendre.

Alors, Ambre Chalumeau déroule le temps et les laisse observer ce monde qu’elles croyaient pourtant connaître et qui soudain ne semble plus tout à fait pareil. Car quand tout vacille, on regarde les choses de travers.

Avec une écriture alerte, l’autrice file dans les pas de ses deux personnages, en croise d’autres qu’elle attrape au vol (une mère qui flanche, un frère taiseux – sublime personnage –, un atroce petit ami toxique, un amoureux caché…) et compose un roman d’apprentissage bouleversant, et surprenant.  

Car Ambre Chalumeau a la politesse d’être drôle, très drôle. Un sens de l’observation couplé à un art de la punchline qui fait mouche. Une façon de faire swinguer les phrases, de trouver la comparaison qui détonne (« Dans GTA, elle faisait des créneaux », merveilleuse façon de décrire l’hyper sérieux d’un personnage).

Elle a la fameuse « petite musique » qu’on a longtemps accolée à Sagan. Mais ici plutôt façon rap battle et rock qui tape. Car derrière l’humour et l’ironie sur les us et coutumes de la bourgeoisie, l’élitisme crasse des prépas, et la légèreté d’une époque, Ambre Chalumeau raconte ces années 2010 comme la fin de l’innocence. Au détour d’un paragraphe, d’une phrase, le récit sait se faire soudain grave quand il évoque ce qui n’est pas encore le mouvement #MeToo, mélancolique et fin quand il offre à chacun des personnages le temps de se raconter dans toutes leurs erreurs, leurs doutes et leurs petites défaites.

Au fil des pages, Les vivants nous propose de faire la paix. La paix avec ce qui déconne, en nous, chez les autres, dans l’époque. Une façon d’avancer, malgré tout.

Invitée par mk2 Institut, Ambre Chalumeau propose chaque mois au mk2 Nation un cinéclub comme un « starter pack » de la cinéphilie, une façon d’avoir toutes les refs pour plonger dans le cinéma. Son premier roman, lui, pourrait bien être le « starter pack » d’une génération pour apprendre à être un peu plus indulgent avec soi et les autres. Pour réserver vos places, c’est par ici.

: Les vivants d’Ambre Chalumeau (éditions Stock, 297 p.)