Après le meurtre suspect de son grand frère lors d’une intervention policière, l’avocat Soulayman, incarné par Kery James, se décide à demander des comptes au juge, interprété par Marc Lainé, qui a acquitté le policier accusé du meurtre. Déguisé en coursier, Soulayman braque le juge et le prend en otage dans son appartement épuré aux lumières tamisées. En quelques minutes, ils se retrouvent emportés dans un intense duel d’éloquence sur des sujets variés, de la démocratie à l’amour, en cinq chapitres.
Le plateau, entouré de caméras qui se déplacent en travelling, est retranscrit sur un écran qui surplombe les comédiens et nous immerge dans un mélange des genres entre théâtre et cinéma, autre terrain fétiche du rappeur, fidèle à lui-même – on ne compte plus les punchlines engagées qui font le sel du texte, parmi lesquelles : « Le policier qui protège n’est qu’une partie de votre fantasme républicain », unanimement applaudie par la salle.
La réalité dépasse la fiction quand Kery James rend hommage aux jeunes tués par la police, parmi lesquels Nahel Merzouk, adolescent de 17 ans victime du tir à bout portant d’un policier le 27 juin dernier à Nanterre. La question sociale chevillée au corps, Kery James va au-delà des défaillances du système judiciaire pour mettre les réalités des quartiers « prolétaires » (terme qu’il défend dans la pièce face à l’expression « quartiers populaires ») face au juge qui, lui, « appartient à une autre France, celle protégée par les institutions ».
: À huis clos, jusqu’au 14 octobre au théâtre Chaillot et du 15 novembre au 3 décembre 2023 au théâtre du Rond-Point.
Le site du théâtre du Rond-point
Portrait : ©Koria