Concert : Shygirl à La Gaîté Lyrique

Ancienne DJ au tempérament volontiers provocant, Shygirl brouille les genres (grime, UK garage, R&B américain, eurodance des années 1990) et les pistes (de danse) avec une élasticité ébouriffante.


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Le nom de scène de la cocréatrice du label NUXXE (fondé avec son producteur fétiche, Sega Bodega) n’est d’ailleurs qu’un trompe-l’œil parmi d’autres : Blane Muise, à peine 30 ans, se révèle bien moins en « fille timide » qu’en charismatique diva electro-freak débitant froidement des lyrics lubriques sur de tranchants EPs. Signe de qualité : on y croise des têtes chercheuses de l’avant-garde pop telles qu’Arca ou la regrettée Sophie. Alias, le dernier projet en date de Shygirl, fait cohabiter pas moins de quatre avatars de la chanteuse londonienne – Bonk, Bovine, Baddie et Bae –, créatures que Blane Muise incarne tantôt elle-même dans ses vidéos riches en postiches et make-up fluo, tantôt sous les traits étranges de poupées modélisées en 3D.

Si Bonk est le diable en personne dans le morceau « Twelve », son visage de clown bleu trahit un mélange de tristesse et de joie incontrôlée qui peut évoquer le Joker. Sur « Leng », on fait connaissance avec Bae, une sorte de Barbie cauchemardée par Aphex Twin, et avec « Siren » c’est la vacharde Bovine qui déboule dans sa robe de princesse, plus caustique que jamais quand elle évoque la misogynie ambiante sur un beat acide. Quant à la vicieuse Baddie, star du clip gélatineux de « Freak », elle figure une version dévergondée des fameuses poupées fashionistas Bratz.

Tous ces masques offrent à Shygirl un terrain de jeu inépuisable pour explorer les différents aspects de sa personnalité transformiste et ultra sexuelle, comme diffractée par une boule disco en une multitude d’ego-trips plus remuants et incendiaires les uns que les autres. Inutile de préciser que l’on a hâte de voir la phénoménale Anglaise embraser Paris avec son armée de doppelgängers. Freak out!

Shygirl, Alias, le 16 novembre à La Gaîté Lyrique.

Photo (c) Aidan Zamiri