mk2 Institut : une autre idée du monde
C COMME CAMUS
Ma première, ma seule leçon de vie, je la dois à Albert Camus, qui m’a appris que ne rien espérer, loin de sceller le destin du cynique, pave la route du jouisseur : « L’espoir, au contraire de ce qu’on croit, équivaut à la résignation. Et vivre, c’est ne pas se résigner. » Aimer le monde pour ce qu’il est, embrasser jusqu’à la fugacité de cette vie comme son plus précieux atour, dessine la seule éthique d’existence qui soit à la mesure de ceux qui vivent sans Dieu. De ce renoncement à l’absolu découlent toutes les idées qui irriguent la pensée de Camus et dont j’ai fait mes repères indéboulonnables : la nuance pour résister aux sirènes des extrêmes, la lucidité contre la tentation confortable de se trouver des excuses, et un sens de la révolte qui « ne peut se passer d’un étrange amour ».
P COMME POURQUOI ?
Petite, comme tous les enfants, je n’avais que ce mot à la bouche. L’art de maintenir toujours vivace la flamme de l’étonnement, loué par Aristote, se perd parfois, en vieillissant, avec les illusions et la révolte. Cette capacité à percer les surfaces les plus dures en quête de sens est pour moi à la fois un aiguillon et un garde-fou. Ne jamais se contenter des apparences ou des premières impressions est évidemment une échappatoire à l’esprit borné et la promesse enivrante d’habiter ce monde en perpétuel aventurier. Mais c’est aussi un remède contre les préjugés, à commencer par les siens. Demander « pourquoi ? », c’est glisser un caillou indélogeable dans la cristallisation dangereuse des certitudes dogmatiques. La meilleure arme dans ce combat contre soi-même qu’on nomme « philosophie ».
V COMME VIOLENCE
L’ensemble de mes recherches est hanté par le problème de la violence. Éric Weil disait que le philosophe est animé par ce désir, aussi impérieux que vain, de faire disparaître la violence. J’estimerai mon travail accompli si je parviens déjà à la faire voir pour ce qu’elle est, quels que soient ses masques. L’ironie d’un monde où la violence est omniprésente, des guerres aux famines dont les images se succèdent sans interruption sur nos écrans de télévision, est qu’elle finit par faire partie du décor, au point de passer inaperçue dans ses premiers balbutiements. Mon attention se focalise sur ces manifestations non spectaculaires de la violence, celles qui incubent dans les coulisses et qui, noyées sous les éclats des horreurs dont est tissée l’histoire, préparent le pire sous notre nez, l’air de rien.
« La violence en face », une série de conférences de Marylin Maeso, à suivre du 15 novembre au 7 février au mk2 Nation, à 20 h.
tarif : 15 € | étudiant, demandeur d’emploi : 9 € | − 26 ans : 4,90 € | carte UGC/mk2 illimité à présenter en caisse : 9 €