« Exposé·es : des personnes n’ont pas choisi d’être exposées à un virus, une maladie, une épidémie. » C’est ainsi qu’est introduite cette exposition chorale basée sur le livre de l’historienne et critique d’art Elisabeth Lebovici Ce que le sida m’a fait. Art et activisme à la fin du XXe siècle (publié en 2017, sur lequel nous avions fait un portfolio). Explorant les liens étroits entre l’épidémie du sida et la création artistique, c’est une virée aussi mortelle que flamboyante, tendre que tragique qui s’offre à nous. Dans l’installation qui couvre tout le sous-sol du Palais de Tokyo, on se perd entre les œuvres de figures mythiques de l’époque aujourd’hui disparues comme Hervé Guibert, Guillaume Dustan ou Felix Gonzales-Torres, et l’on découvre des inédites des photographes encore bien vivantes Zoe Leonard ou Nan Goldin.
Le sida à l’écran, une affaire de morale
Si certaines œuvres sortent tout droit des années 1980 ou 90, d’autres sont des créations commandées spécialement pour l’exposition, comme à l’artiste Lili Reynaud Dewar, créant un intéressant dialogue entre ce qui fut et ce qui reste. Historique et bien entendu militante, l’exposition fait aussi participer des associations comme Act-Up et les Amis du Patchwork des Noms, et dédie une salle à l’activisme des lesbiennes du groupe d’art new-yorkais Fierce Pussy. On ne saurait dire si on marche en Enfer, dans les limbes ou au Paradis, tant les thèmes de la douleur, de l’attente, mais aussi de l’amitié et de la tendresse sont entremêlés, pour au final rejouer l’éternel duo de l’Eros et du Thanatos.