Une arrivée par le ciel dans une bulle de savon géante, vêtue d’une robe meringue rose bonbon : on n’en attendait pas moins de la part de la petite princesse des sitcoms. Dans le très attendu Wicked, Ariana Grande débarque, impériale, puis déjoue toutes les attentes face à une Cynthia Erivo qui nous laisse béat.
Réécriture du mythique livre Le Magicien d’Oz, adapté au cinéma en 1939 par Victor Flemming avec Judy Garland dans le rôle de Dorothy Gale, jeune orpheline projetée dans le monde fantastique d’Oz, Wicked s’empare de Broadway en 2002 et devient une comédie musicale ultra-rentable qui fera ses choux gras de la rivalité entre la Bonne sorcière du Sud, Glinda, et la Méchante sorcière de l’Ouest à la peau verte, Elphaba, une histoire moins évidente qu’elle n’y parait.
Première partie d’une adaptation en deux volets dont la suite est prévue pour l’année prochaine, le nouveau film de John M. Chu, à qui l’on doit Crazy Rich Asians (2018), est un petit bijou visuel et immersif, prodigieuse plongée dans un univers encore assez méconnu en France. Exit Judy Garland et surtout Dorothy Gale, place aux géniales Cynthia Erivo et Ariana Grande (qui étonne vocalement) dans les rôles d’Elphaba et de Glinda, autrefois colocs à l’université de Shiz, genre de Poudlard par lequel on arrive aussi en bateau mais qui bénéficie d’un temps radieux, chose beaucoup plus rare à l’école des sorciers d’Harry Potter. Le film revient sur leur rencontre et les différences qui finiront par les rassembler pour les mener jusqu’à la cité d’Émeraude, capitale du Pays d’Oz et lieu de résidence du Magicien.
Teinté d’un second degré totalement inattendu – avec une Ariana Grande désopilante à souhait, à mi-chemin entre le caractère faussement adorable d’une Dolores Ombrage et l’esprit niais de la playmate Shelley du film Super Blonde – l’adaptation proposée par John M. Chu se démarque par une maîtrise technique autant que stylistique.
Le jeu de Cynthia Erivo tout comme sa voix sont une véritable découverte et appuie, avec justesse, les émotions d’un personnage traversé par la haine et les moqueries du monde. Les scènes de danse et de chant, sans jamais donner le tournis, nous immerge parmi les acteurs à coups de travellings hyper maîtrisés et d’idées un peu folles– dont une scène digne de la roue de la mort qui aurait bien bu décapiter un comédien (véridique). Tout est méticuleusement pensé et l’expérience visuelle est aussi forte que celle proposée musicalement. On ne connaît pas toutes les chansons (mais ça ne devrait pas tarder) et c’est tant mieux ! Le voyage en est d’autant plus dépaysant.
La fidélité à l’univers ravira les connaisseurs et les amoureux de comédies musicales en auront eux aussi pour leur compte : avec deux heures quarante de déambulations chantées à travers Oz, ils seront plus que satisfait… ou alors bruleront d’impatience de retrouver leurs sorcières bien aimées, tout comme nous, et réécouterons en boucle Defying Gravity pour ne rien oublier de cette odyssée éblouissante, traversée d’un second degré surprenant.
Wicked de Jon M. Chu, 2 h 40, Universal, en salles le 4 décembre