Pourquoi ce beau titre, et d’où vient-il?
C’est une référence à un film est-allemand de Frank Vogel, inédit en France, dont j’ai utilisé des images : Denk bloß nicht, ich heule (1965). Cela peut être traduit par « Ne croyez surtout pas que je pleure », mais le verbe « heulen » signifie aussi, par extension, « hurler ». En le découvrant, je me suis immédiatement dit que cela résumait idéalement les états dont j’essaie de rendre compte et la position du narrateur par rapport au monde.
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Provoquée par une séparation, la dépression du narrateur est vite alimentée par une époque jugée navrante. En est-ce le carburant ou son parfait cocon?
La dépression traversée par le narrateur est omnivore, elle phagocyte tout avec boulimie : le deuil, la solitude et les états affligeants d’un monde ultralibéral et répressif. Mais elle ne parvient pas à étouffer un sentiment de colère, de révolte, issu des dérives politiques contemporaines, qui lui opère comme un carburant, provoque le sursaut qui rend possible le film.
Les extraits, tirés pour certains de films célèbres, sont méconnaissables. Vouliez-vous éviter l’effet citation?
Les plans qui constituent le matériau premier du film sont des inserts, des plans de coupe, d’objets, de paysages ou de parties du corps. Habituellement, ils sont brefs et informatifs. Je voulais les extraire de leur contexte initial pour les intégrer à une autre syntaxe, comme les éléments déchaînés d’un flux de conscience. Il fallait échapper à l’effet quiz, que l’on n’ait ni le temps ni l’envie de se demander d’où provenait chacun de ces plans qui sont comme dégurgités après une surdose cinéphage.
Ne croyez surtout pas que je hurle de Frank Beauvais, Les Bookmakers / Capricci Films (1 h 15), sortie le 25 septembre
Image: Copyright Les Bookmakers / Capricci Films