Le cinéaste autrichien Patric Chiha (Brothers of the Night) interprète librement la pièce Crowd (2019) de son amie d’adolescence, la chorégraphe Gisèle Vienne. Une échappée fantasmatique et entêtante dans la nuit, et les fictions qu’on s’y fait.
En 2009, dans son premier long métrage, Domaine, Patric Chiha nous emportait avec une scène de boîte de nuit qui reste l’une des plus puissantes et hypnotiques vues au cinéma. Sur un fond noir enfumé, les corps se détachaient dans des chorégraphies au rythme ralenti pensées par Gisèle Vienne. On retrouve cette ambiance à la fois frénétique et voluptueuse dans Si c’était de l’amour, où la nuit en club est filmée comme un rituel ouvrant nos perceptions, altérant notre appréhension du temps.
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Le cinéaste a filmé les répétitions de Crowd de Gisèle Vienne, pièce dans laquelle la chorégraphe ausculte, décompose, fait varier les vitesses des mouvements de quinze danseurs recréant sur scène une rave des nineties. D’abord portrait de Gisèle Vienne en pleine création (émouvant, car on sent bien toute l’amitié que porte Chiha à l’artiste), le film décolle vite pour laisser la parole aux danseurs (ce qu’ils vivent sur et hors de la scène) et se jeter et se perdre dans leurs gestes furtifs qui portent un millier d’histoires. Circulation des désirs, magnétisme des regards, force des sentiments et sinuosité des sensations : autant d’événements impalpables auxquels la caméra s’abandonne, comme pour retenir tout ce que la nuit a de fugace et tend à accélérer.
Si c’était de l’amour : de Patric Chiha, Norte (1 h 22)
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