« Sebastian » de Mikko Mäkelä : corps communs

Un jeune Londonien s’inspire de son expérience de travailleur du sexe pour écrire. Ce deuxième long métrage spleenétique réalisé par Mikko Mäkelä (« Entre les roseaux », 2017) pose des questions pertinentes sur l’autofiction.


Sebastian (c) Bêtes Sauvages
Sebastian (c) Bêtes Sauvages

Fan de l’écrivain Bret Easton Ellis, Max, l’auteur d’une autofiction aussi originale et effrayante que le roman Lunar Park, écrit par son idole, aimerait que son premier roman ait autant d’ampleur, qu’il puisse éviter toutes les idées reçues attenantes au genre autobiographique (narcissisme, exploration des traumas, élitisme bourgeois…). Tandis qu’il s’inspire de ses nuits d’escorting avec des hommes plus âgés et sous le pseudo de Sebastian, ses éditeurs aimeraient justement qu’il tire son récit vers plus de sensationnalisme – ce qui traversait ses premiers écrits.

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Mais progressivement, de rencontres en rencontres avec ses clients, lui imagine plutôt que son manuscrit devrait raconter le travail du sexe comme une activité de l’ordre du care – une relation liée au soin, basée sur l’échange – puisque c’est comme ça que lui la vit.

Max ne voudrait pas être cet auteur qui vampirise ses sujets, mais au contraire célébrer un sentiment de communauté, parler aussi du vécu de ces hommes gays – c’est assez fascinant comme Mikko Mäkelä filme d’abord les scènes de sexe comme des séquences d’écoute.

Au final, il s’interroge même sur son pseudo, sur l’idée de se cacher derrière puisque lui cherche avant tout l’authenticité. Le film pose alors cette question de l’écrivain face au business de l’édition, mais plus encore de l’artiste négociant avec les compromis.

: Sebastian de Mikko Mäkelä (Optimale Distribution, 1h50), sortie le 9 avril