SCENE CULTE: « Témoin à charge »

A l’occasion de la ressortie en DVD de Témoin à charge, sans doute le meilleur film noir de Billy Wilder, on vous parle d’une scène mythique qui résume à elle seule l’art illusionniste du réalisateur. Dans le documentaire Portrait d’un homme à 60% parfait: Billy Wilder qui accompagne la réédition de Témoin à charge chez


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A l’occasion de la ressortie en DVD de Témoin à charge, sans doute le meilleur film noir de Billy Wilder, on vous parle d’une scène mythique qui résume à elle seule l’art illusionniste du réalisateur.

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Témoin à charge, Billy Wilder

Dans le documentaire Portrait d’un homme à 60% parfait: Billy Wilder qui accompagne la réédition de Témoin à charge chez Rimini Éditions, Michel Ciment explique pourquoi il considère Sherlock Holmes comme l’alter ego du cinéaste: «C’est un enquêteur qui veut trouver la vérité, un homme rationnel.» On se permettra de contredire un peu le critique: si un personnage ressemble à Wilder dans sa filmographie, c’est bien sir Wilfrid Robarts, le ténor du barreau de Témoin à charge interprété par Charles Laughton. Un peu terne dans la pièce originelle d’Agatha Christie, il est doté dans le film d’un humour à froid, d’une énergie physique explosive, d’un amour immodéré pour le cigare et d’une persévérance qui sont l’apanage du cinéaste. Surtout, ce dernier file tout au long du film une analogie unique entre son métier et celui d’avocat.

Le monocle: un miroir aux alouettes

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Dans l’une des premières scènes, Robarts reçoit dans son bureau Leonard Vole (Tyrone Power), suspect numéro un du meurtre d’une riche bourgeoise qui clame son innocence. Pour mettre à l’épreuve sa sincérité, le juriste chausse un monocle et, jouant avec la réflexion du soleil, braque une lucarne aveuglante sur le visage de Vole. C’est un simple champ-contrechamp: Laughton, debout, imperturbable, qui braque son rayon, et Power, assis, ébloui, luttant pour garder sa contenance. «Ce n’est pas moi, malgré les apparences! Il faut me croire! Vous me croyez ?» Le monocle est devenu un projecteur, et l’avocat, un metteur en scène qui dirige la lumière pour révéler une vérité.

Et si celle-ci s’avérait finalement être un mensonge, c’est parce que le cinéma selon Wilder est d’abord un art de l’illusion: c’est nous, spectateurs, qui sommes aveuglés, pris au piège de la lumière, menés à croire ce que l’on nous montre. D’ailleurs, l’idée du monocle n’est pas de Wilder, mais de Charles Laughton, qui l’avait lui-même piquée à son avocat… Témoin à charge peut se regarder comme un miroir aux alouettes dans lequel le cinéaste diffracte son image.

Témoin à charge de Billy Wilder, sortie en DVD (Rimini Éditions)