
Prenant ici comme point de départ ses souvenirs d’enfance dans la France de 1991, Manele Labidi imagine, dans son deuxième long métrage, le parcours d’une mère au foyer pleine de verve, Amel (jouée par la virevoltante Camélia Jordana), qui souhaite la meilleure scolarité possible pour ses deux filles. Mais, lorsque la famille, qui vit des revenus du père (épatant Sofiane Zermani), est menacée de perdre son appartement situé dans les beaux quartiers et doit envisager d’aller vivre en banlieue, Amel prend soudain conscience de la difficile position d’immigrée maghrébine qu’elle occupe…
Prenant le parti de la réinvention fantaisiste, la scénariste et cinéaste franco-tunisienne a notamment l’idée de faire intervenir un vrai personnage historique, Charles Martel (truculent Damien Bonnard), dans le quotidien de la fille aînée, effrayée par ce qu’elle a entendu à l’école (Martel a « arrêté les Arabes à Poitiers » en 732). Ce choc a sur elle un effet étrange : l’ado développe dès lors une obsession pour le chef militaire franc, devenu son ami imaginaire. Cette embardée onirique, à la fois drôle et originale, est le point de départ d’une réflexion profonde, intime et politique, et valable hier comme aujourd’hui, sur l’accueil réservé aux populations venues d’autres pays.
Reine mère de Manele Labidi, sortie le 12 mars, Diaphana (1 h 33)