« Porcherie » de Pier Paolo Pasolini ressort en salles : notre critique

En explorant l’ignominie de ses personnages en proie à une crise existentielle, Pier Paolo Pasolini signe avec « Porcherie » un film mystique et subversif, à (re)découvrir aujourd’hui en version restaurée.


Porcherie de Pasolini © Malavida
Porcherie de Pasolini © Malavida

Porcherie alterne une double intrigue, l’une explorant la zoophilie d’un jeune bourgeois (Jean-Pierre Léaud) dans l’Allemagne d’après-guerre, encore marquée par les stigmates du nazisme. L’autre révélant le cannibalisme d’un homme (Pierre Clémenti) muet et affamé, errant dans la lande volcanique de l’Etna en Sicile au xvie siècle. Tous deux situés à des époques différentes mais éprouvant en commun une difficulté à donner du sens à leur vie.

Bien que le cinéaste marxiste soit un habitué de la Mostra de Venise dès son premier film Accattone (1961), Porcherie est vivement rejeté par la critique lors de sa présentation le 30 août 1968. Auprès de Yvonne Baby pour le journal Le Monde en 1969, Pier Paolo Pasolini explique la genèse de ce « film pessimiste », inspiré d’une pièce de théâtre qu’il a lui-même écrite en 1965 lors d’un « moment de désespoir existentiel » dû à la disparition du sacré au profit d’une société industrialisée et consumériste.

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À travers ces images iconoclastes, le film résonne encore avec les affres de l’époque contemporaine tels que le populisme, les violences sociales poussées à l’extrême et les dérives du néolibéralisme.

Si Porcherie suscite toujours autant le malaise de par l’abjection de ces personnages, il serait judicieux de le (re)découvrir sous l’angle de l’allégorie filmique qui subversive notre regard. Contrairement à ses premiers films, héritiers du néoréalisme, Pasolini radicalise sa mise en scène pour capter l’archaïsme de ses héros esseulés hors du temps, peut-être même hors du monde.

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Porcherie de Pier Paolo Pasolini (Malavida, 1h38), sortie le 5 mars.