D’emblée, elle impose un mélange de simplicité et d’élégance, à l’image de la mise en scène du Ravissement. Et quand elle parle, elle tourne autour de la bonne formule pour nous livrer une pensée limpide et passionnante. Ce côté réfléchi se sent dans l’écriture soignée de ses personnages (incarnés par Hafsia Herzi, Alexis Manenti, Nina Meurisse), mis à distance des clichés.
Iris Kaltenbäck tient cette fibre sensible de ses parents, psychanalystes. «J’ai été élevée par des gens qui s’intéressaient énormément aux êtres humains et qui m’ont appris à toujours regarder à côté, à ne jamais juger.» Jeune, elle se découvre une passion pour le ciné (d’abord commercial, puis moins – elle adore les films du Polonais Krzysztof Kieślowski ou de l’Argentine Lucrecia Martel), autant que pour les faits divers. Elle hésite à être cinéaste ou avocate pénaliste.
Elle suit des études de philo et de droit, mais ne peut s’empêcher de citer des films en intro de ses dissertations. Finalement, elle s’inscrit à La Fémis, en scénario, et en sort diplômée. S’ensuit la réalisation du court Le Vol des cigognes (2015), qui porte déjà le même sujet que Le Ravissement – une héroïne en perte de repères après une rupture amoureuse puis l’annonce de la grossesse de sa meilleure amie, qui finit par s’embourber dans un gros mensonge.
Inspirée par un fait divers, sa lecture du Ravissement de Lol V. Stein de Marguerite Duras mais aussi par l’expérience qu’elle a vécue avec une amie, elle nous confie que ce premier long a été fait dans une forme d’urgence. Sa fin, apaisée, fluide, sans esbroufe, nous donne l’impression d’avoir assisté à la naissance d’une grande cinéaste de l’intime.
Le Ravissement d’Iris Kaltenbäck (Diaphana, 1 h 37), sortie le 11 octobre
Photographie : Julien Liénard pour TROISCOULEURS