Le cinéaste roumain Cristi Puiu adapte brillamment le chant du cygne du philosophe Vladimir Soloviev pour réaliser un film à la lisière du fantastique.
S’il troque l’appartement exigu de Sieranevada (2016) pour un manoir en Transylvanie, Cristi Puiu conserve son amour des temps longs et des films de groupe enflammés. Dans son domaine, le mondain Nikolai reçoit ses amis de la haute société. Originaires de divers pays d’Europe mais parlant tous un français soutenu, les protagonistes, personnifiant chacun un idéal précis, sont comme immobilisés par la neige alentour.
À LIRE AUSSI : Tous au cinéma : nos recommandations de films à voir à partir du 1er juillet
Chacun y défendra, durant le séjour, son point de vue sur le monde… Adaptant le chant du cygne du philosophe russe Vladimir Soloviev, écrit à l’aube du XXe siècle, le cinéaste roumain fait le pari risqué de consacrer un film à la parole ; une parole qui, contrairement au livre, se déverse en un flux dévorant et ininterrompu. Sans aucune esbroufe, le cinéaste filme brillamment la cruauté d’échanges sentencieux qui, à peine perturbés par le vacarme d’une force omnisciente, pourraient se poursuivre ad nauseam. La dimension quasi fantastique de Malmkrog tient ainsi à l’éternel alanguissement de ces aristocrates retirés du monde qui, feignant d’ignorer les attentions de leurs domestiques, s’épuisent littéralement à penser.
Image © Shellac Films