D’un roman semi-autobiographique de Marguerite Duras sur une attente invivable, Emmanuel Finkiel (Je ne suis pas un salaud) tire un faux thriller jonglant habilement entre tension et flottement. En 1944, Duras (vibrante Mélanie Thierry) attend avec désarroi le retour de son mari, Robert Antelme, arrêté puis déporté alors qu’il participait, comme elle, à la résistance. Soutenue par son ami et amant Dionys (Benjamin Biolay), elle amorce un dangereux jeu de séduction avec un agent français de la Gestapo (Benoît Magimel) pour tenter de faire libérer son époux. Le cinéaste construit méticuleusement la relation étrange que l’écrivaine tourmentée tisse avec l’agent, au fil de rendez-vous ambigus qui ne permettent jamais de dire qui a l’ascendant sur l’autre. La pression qui pèse sur les épaules de Duras ne se relâche pas, mais prend des contours plus cotonneux après leurs rencontres, à l’image d’une scène où elle marche dans Paris et voit les bâtiments flous, des violons stridents en bande-son, comme si tous ses sens étaient déréglés. Sans esbroufe, Finkiel s’approche du style de l’écrivaine, dont la prose si puissante résonne en voix off.
d’Emmanuel Finkiel
Les Films du Losange (2 h 06)
Sortie le 24 janvier