
Quelle est la clé d’un bon générique d’ouverture, selon vous ?
Un bon générique doit contenir l’ADN du film. Cela peut être subtil ou manifeste, simple ou complexe. L’un de mes génériques préférés est celui de L’Heure du loup d’Ingmar Bergman. Les crédits se déroulent sur fond noir avec le son d’un décor en train d’être construit. On entend une voix dire « Caméra ! » et « Action ! », puis la première image est celle d’une femme assise à une table de pique-nique à la campagne. Ses premiers mots sont : « Je n’ai plus rien à raconter. » Le générique a tout raconté du film sans concrètement vous dire quoi que ce soit. C’est brillant.
Comment êtes-vous devenu concepteur de titres ?
J’ai commencé ma carrière dans le cinéma indépendant, les publicités, la conception d’émissions et les vidéos musicales. La conception de titres faisait partie de la conception d’émissions, et j’ai toujours aimé cela. Il n’y a pas de formation spécifique, mais il faut quand même avoir des connaissances en design. En revanche, je pense qu’il est essentiel de savoir regarder une œuvre, de se faire un point de vue clair et de savoir le transmettre.
Comment travaillez-vous avec David Cronenberg ?
Ses films sont tous très différents les uns des autres, mais je m’intéresse toujours à leur corporéité, leur incarnation. Par exemple, dans A Dangerous Method, ce sont les lettres échangées entre Sigmund Freud, Carl Jung et Sabina Spielrein ; dans Les Crimes du futur (2022), ce sont les tatouages.
Lorsque je travaille avec David Cronenberg, je lis le scénario, puis je visionne une première version du film avec le monteur. De là, je croque quelques idées sur un carnet. Puis nous nous réunissons, David, le monteur et moi-même, pour en discuter. David a l’art d’être à la fois ouvert et précis sur les idées. Il suit de près mon travail, il me laisse un grand espace de création. Pour moi, travailler sur ses films, c’est comme réaliser un petit film qui parle de son film depuis l’intérieur du film… si cela a un sens.
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Quel élément vous a inspiré pour Les Linceuls ?
Sans en dire trop sur le film, j’étais très intéressé par la technologie des « linceuls » et par la façon dont ils représentent le corps. Le générique d’ouverture est donc une sorte de représentation du corps à travers ce médium, mais il résonne également avec notre perception culturelle des véritables linceuls funéraires. Le film contient également un dialogue émouvant sur le temps qu’il faut pour lâcher prise. Je voulais que les titres renvoient à cette idée de temps et d’attachement.
⚫Fiche métier
Un concepteur de titres imagine et fabrique les éléments visuels qui apparaissent à l’écran pour introduire et parfois terminer un film ou une émission de télévision. Il conçoit également les crédits et le titre d’une œuvre à l’aide de la typographie.