Félix Maritaud, quel cinéphile es-tu?

Repéré dans 120 battements par minute de Robin Campillo en 2017, l’acteur a révélé son talent brut dans Sauvage de Camille Vidal-Naquet (2018), dans lequel il campe un travailleur du sexe en mal d’amour. De passage au FIFIB, on en a profité pour rencontrer celui qui est à la fois membre du jury de la


Repéré dans 120 battements par minute de Robin Campillo en 2017, l’acteur a révélé son talent brut dans Sauvage de Camille Vidal-Naquet (2018), dans lequel il campe un travailleur du sexe en mal d’amour. De passage au FIFIB, on en a profité pour rencontrer celui qui est à la fois membre du jury de la sélection « Contrebandes » et acteur dans le court jouissif De la terreur, mes sœurs ! d’Alexis Langlois. Au vu de ses choix artistiques toujours engagés, on était curieux d’en savoir plus sur ses goûts cinéphiles.

3 personnages auxquels tu pourrais t’identifier ? 

Brad Pitt dans Burn After Reading des frères Coen, parce qu’il est stupide mais super passionné. Stanley le troll dans Le Lutin magique de Don Bluth et Gary Goldman. C’est un dessin-animé génial, totalement perché et ce personnage ne ressemble à rien mais il est trop mignon. Jean Genet. C’est quand même un personnage en un sens, il y a toute une légende autour de lui. J’aime son écriture très libre, imagée, sensuelle, primitive. 

3 cinéastes avec lesquels tu aimerais tourner ? 

Leos Carax, Claire Denis et Gregg Araki. Claire Denis a une manière hyper radicale de communiquer les émotions dans ses films, que ce soit tenu ou explosif. Ça me plait vachement. Gregg Araki parce que, s’il y a un cinéaste qui m’a beaucoup aidé dans mon identité, ma conception de la sexualité, c’est bien lui. C’est un des papas de la culture queer. Et Carax parce qu’en tant qu’acteur, tu dois t’éclater. Quand je vois Denis Lavant jouer dans ses films, je me dis que ça doit être génial de tourner sous sa direction. 

Le film que tu pourrais regarder à 3h du mat’, une nuit d’insomnie ?

Les Enfants du paradis de Marcel Carné. Parce
que c’est un gris total, sans trop de contrastes. Tout y est doux. En plus,
j’adore le pantomime. Je trouve ça trop beau. [Il cite la réplique phare du
film en imitant la diction très particulière d’Arletty
] « Paris est
tout petit pour ceux qui s’aiment comme nous d’un aussi grand amour !
»  Cette réplique, ça me fait penser que la vie, c’est
aussi croiser les bonnes personnes aux bons moments. 

L’acteur ou l’actrice qui te faisait fantasmer à 13 ans ? 

Béatrice Dalle, mais faut pas lui dire. Je me souviens que quand je la voyais dans les médias, je la trouvais inquiétante de liberté. Sur les plateaux télé, c’était la seule à parler simplement, à ne pas représenter quoi que ce soit à part elle-même.

À LIRE AUSSI > Notre compte-rendu du FIFIB  

3 personnages dont tu pourrais tomber amoureux ? 

Mia Wallace dans Pulp Fiction de Quentin Tarantino, parce qu’elle est totalement cramée, j’adore. Leeloo dans Le Cinquième élément de Luc Besson, parce que je la trouve trop attendrissante. Et Bud Clay dans The Brown Bunny. C’est pas dur de tomber amoureux de Gallo je pense. Enfin, sauf si tu parles trop avec ! Mais bon, je trouve ça assez classe un mec qui vend des fioles de son sperme sur Internet. 

3 films qui t’ont impressionné par leur audace ? 

Maîtresse de Barbet Schroeder avec Bulle Ogier et Gérard Depardieu. Les images sont crues, on y fouette des fesses par exemple, mais le film exprime une simple vérité, celle d’une maîtresse dominatrice qui vit dans un donjon et tombe amoureuse. Les Misérables de Ladj Ly. C’est intelligent, beau et on sent une vraie proposition de cinéma. Les Rencontres d’après-minuit de Yann Gonzalez. Le minimalisme et l’intimité du film sont super beaux, avec ces personnages qui se réunissent pour une partouze et qui vont déverser toutes leurs passions, tous leurs états d’âme. J’aime beaucoup Yann Gonzalez. 

3 films méconnus à voir absolument ? 

Rêve de singe de Marco Ferreri avec Marcello Mastroianni et Gérard Depardieu. Le pitch, c’est deux hommes qui sont à New-York et qui trouvent le cadavre de King-Kong. Voilà, je t’en dis pas plus, il faut le regarder. Le Trou de Jacques Becker. Ça se passe dans une cellule de prison avec quatre mecs dedans. Ils ont prévu de s’échapper sauf qu’un nouveau arrive la veille de l’exécution du plan. Ça parle beaucoup des rapports entre hommes, d’honnêteté, de loyauté. Super 8 1/2 de Bruce LaBruce, un film underground et gay porn des années 1990 sur la chute d’une pornstar.  C’est génial et il y a toute une réflexion sur la virilité. 

3 films qui te donnent envie de battre le pavé ? 

Black Panthers d’Agnès Varda. Ou plein d’autres de ses films. Elle est parfaite et sa filmographie est un sans-faute. Le documentaire Marsha P. Johnson de David France, sur une grande militante trans américaine. C’est un documentaire très fort sur l’incompétence de la justice face concernant les questions trans. Et puis, forcément, 120 battements par minute. Ça m’a donné envie d’être acteur, donc d’une certaine manière de militer. 

3 personnages d’outsiders que tu affectionnes ? 

Zachary, joué par Dylan Robert dans Shéhérazade de Jean-Bernard Marlin. C’est un personnage miraculeux. Il a une grâce, une humanité, et il n’est jamais là où on l’attend. Mona (Sandrine Bonnaire) dans Sans toit ni loi d’Agnès Varda. C’est le film qui a drivé Sauvage et quand je l’ai vu, j’ai halluciné. Là, on est au bout de la marginalité. En troisième, j’ai pas d’idées. Peut-être mes personnages, même si j’aime pas plus que ça me regarder à l’écran. 

Photo : (c) Philippe Quaisse

« Festival International du Film Indépendant de Bordeaux », jusqu’au 21 octobre