![Edward Norton : « Quand j’étais étudiant, j’étais passionné par les années 1960 » 1 Edward Norton](https://www.troiscouleurs.fr/wp-content/uploads/2025/01/Edward-Norton-1024x750.png)
Votre personnage apparaît comme une sorte d’ange lumineux de la musique folk, mais il semble aussi déjà un peu démodé dans le regard de Bob Dylan. C’est cette complexité qui vous a attiré ?
Oui, tout ça à la fois. Quand j’étais étudiant [à la fin des années 1980, ndlr], j’étais passionné par cette époque et ces artistes : Bob Dylan, Pete Seeger, Joan Baez… J’ai emménagé à Greenwich Village quand j’étais jeune et ces personnes faisaient déjà partie de la mythologie de New York. Que vous fassiez du théâtre, de la musique ou autre, la légende de Bob Dylan et Pete Seeger du début des années 1960 représentait quelque chose d’énorme.
A cette époque, Pete Seeger était quasiment une figure olympienne au sein des arts et de la défense de l’environnement. Il était connu comme une sorte de doyen pour les artistes humanistes et activistes [militant pour les droits civiques et très engagé politiquement, Pete Seeger a même chanté en 2009, à l’âge de 90 ans, durant la cérémonie d’investiture de Barack Obama, ndlr]. Mais il y a un danger quand vous admirez trop quelqu’un, il faut se demander si c’est une bonne idée de l’incarner à l’écran.
Comment avez-vous fait face à ce danger ?
James Mangold est un excellent psy, il est très doué pour aider les acteurs à mettre de côté leur histoire et à trouver la complexité des relations. Il disait à propos de Joan Baez [mythique chanteuse de folk interprétée dans le film par Monica Barbaro, ndlr] et Bob Dylan [joué dans le film par Timothée Chalamet, ndlr] des choses passionnantes comme : « Vous pouvez tomber amoureux de quelqu’un et être malgré tout en compétition avec. »
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Et à propos de Pete Seeger et Bob Dylan – qui, je pense, vénère encore aujourd’hui Pete Seeger : « Vous pouvez voir quelqu’un comme votre petit frère, la personne à qui vous voulez passer le relais, mais être en même temps préoccupé par son comportement [le film dépeint le conflit progressif entre Seeger et Dylan, dont l’apogée interviendra au houleux Festival de folk de Newport en 1965, ndlr] ». Ce sont ces contradictions qui rendent l’ensemble intéressant.
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Vous êtes né à la fin des années 1960 et le film replonge justement dans cette décennie. Pensez-vous que c’est important de revenir à cette période de révolutions politique et sexuelle ?
Ce qui mérite vraiment notre attention, c’est la manière dont les jeunes gens de cette époque avaient une foi idéaliste en l’art. Ils pensaient vraiment que l’art pouvait apporter du changement. Et ça, ça vaut la peine d’y réfléchir, et peut-être de s’en inspirer.
Dans le film, vous chantez et jouez du banjo. Cela a été un défi pour vous ?
C’était surtout une joie et un des aspects les plus excitants et marrants du projet. On n’a pas souvent cette possibilité de jouer d’une manière différente. Je pense que beaucoup d’acteurs suivent une formation musicale, c’est presque fondamental. Pour les scènes de concerts, James Mangold ne voulait pas créer une fausse foule en images de synthèse, il s’est assuré qu’on joue réellement devant des centaines de personnes. C’était incroyable qu’il crée pour nous des conditions aussi authentiques.
Quels ont été vos récents coups de cœur au cinéma ?
Il y en a tellement ! Je dirais The Apprentice, j’adore les films d’Ali Abbasi. Si vous n’avez pas vu Border et Les Nuits de Mashhad, il faut les voir. Ce type enchaîne les films sublimes. Il ne faut pas que le fait que The Apprentice soit un film sur Trump vous dissuade de le voir [le film raconte l’ascension dans les années 1970 et 1980 du jeune Donald Trump dans le monde de l’immobilier, ndlr]. Moi non plus je n’ai aucune envie d’avoir affaire à Trump, mais je vous assure que Sebastian Stan et Jeremy Strong sont totalement brillants dans ce film.
J’ai aussi adoré The Brutalist [de Brady Corbet, en salles le 12 février, ndlr], qui m’a rappelé Reds de Warren Beatty [sorti en 1981, ndlr] – c’est le genre de film que j’adore. Et j’ai trouvé Adrien [Brody, ndlr] incroyable, grandiose dedans.
J’ai beaucoup aimé le film indépendant irlandais Kneecap [qui sortira en France en juin 2025, ndlr], qui parle des rappeurs gaéliques. J’adore aussi tous les films de Jacques Audiard. J’ai vu De battre mon cœur s’est arrêté, Un prophète, De rouille et d’os, Dheepan… Je pense qu’il est un des grands maîtres vivants du cinéma.
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