Une fois n’est pas coutume, il faut sans doute présenter Déserts en commençant par son milieu. Après avoir suivi les pérégrinations insolites de deux recouvreurs de dettes dans l’immensité du paysage marocain, dont la motivation peine à aller au-delà de leur costume-cravate trop large, la mise en scène de Faouzi Bensaïdi prend de l’ampleur et se met à suivre le sillage d’une voiture lancée à vive allure dans les dunes. Ce plan, qui opère un soulèvement poétique, rompt la petite tonalité tragicomique qui suivait son cours et plie le récit en deux.
Déserts intègre donc deux temps et deux filiations. Il installe, d’abord, un univers et une méthode burlesques, multipliant les clins d’œil au cinéma de Jacques Tati – à travers l’incongruité des us et coutumes modernes – ou à celui d’Elia Suleiman – auquel il emprunte la fixité des cadres et l’humour froid. Mais, en aval de ce sublime retournement, c’est tout le film qui change de dimension. Magnétisé par le hasard d’une rencontre avec un repris de justice ténébreux, qu’on jurerait évadé du grand Ouest américain, le spectateur voit l’écran s’ouvrir sur une flamboyante mer de sable à perte de vue, et le film s’embarquer dans une longue errance existentielle et mélodramatique.
Déserts de Faouzi Bensaïdi, Dulac (2 h), sortie le 20 septembre
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