LE FILM : MAALBEEK
« Je ne me souviens pas de l’explosion. C’est pour ça que j’essaie de remettre des images là où il n’y en a pas. » Dans Maalbeek, Ismaël Joffroy Chandoutis recueille le témoignage de Sabine, victime de l’attentat terroriste perpétré le 22 mars 2016 dans le métro de Bruxelles. À cette image manquante répond un trop plein, le flux médiatique qu’a absorbé le réalisateur aux moments des faits, lui qui a longtemps vécu dans ce quartier de la capitale.
Les récits subjectifs des faits glanés par Sabine répondent à des fragments d’images tournées sur le vif ou retravaillées en animation 3D par le réalisateur. La distorsion du réel se confond avec la mélodie de la Lettre à Elise qui, arrangée par Sergio Baietta, sonne avec l’inquiétante étrangeté de quelque chose de familier. Comme dans Valse avec Bachir d’Ari Folman, documentaire animé où un soldat traque la mémoire enfuie de ses combats, Maalbeek s’avère être un film autant sur le traumatisme d’une catastrophe que sur l’évanescence de la réminiscence.
Le film est visible gratuitement jusqu’au 11 août dans Libre court, sur le site france.tv
LE FILMEUR : Ismaël Joffroy Chandoutis
Formé au Fresnoy à Tourcoing et à l’Insas à Bruxelles, Ismaël Joffroy Chandoutis, né en 1988, soumet sa démarche documentaire à une réflexion sur les nouvelles technologies de l’image qui navigue entre cinéma et art contemporain. L’animation 3D à laquelle il recourt vient questionner l’immatériel de la technologie numérique, comme dans Ondes noires (2017) qui cherche à rendre visible les ondes qui altèrent le quotidien des personnes électrosensibles auxquelles il donne la parole.
Primé à IndieLisboa et Clermont Ferrand, Swatted (2018) fonctionne par récupération d’images de jeux vidéo afin d’évoquer une pratique cauchemardesque du jeu online qui consiste à hacker l’identité de joueurs pour faire intervenir chez eux des forces de l’ordre sous un faux-prétexte. La vidéo d’eux-mêmes en train de commenter leur partie voit alors surgir une intervention de policiers sur-armés croyant à tort pénétrer une scène de crime. La violence semble alors sortir du jeu pour se propager dans le quotidien, et met en abyme la virtualité du réel et la réalité des images. Les images comme les sujets qu’aborde le réalisateur mettent en abyme la virtualité du réel et la réalité des images.