Il aime les câlins, les comptines, les fortune’s cookies et ses quatre enfants. Le père de Peter Entell est toujours aussi heureux en maison de retraite, où il trouve même un amour de fin de vie en la personne d’une autre résidente. Ravi de pouvoir souffler chaque année ses bougies dans le même restaurant avec les siens, fier de ses enfants qui ont fait de brillantes études et habitent maintenant aux quatre coins du globe, il a tout de l’homme tranquille au parcours sans tâche, qui s’apprête à quitter ce monde en paix.
Mais en adressant son film, en voix-off, à sa propre mère comme s’il lui donnait des nouvelles de la famille, Peter Entell sème peu à peu le doute. On apprend que cette femme, restée pour lui un mystère, est décédée dans l’enfance du cinéaste, d’une hémorragie interne non-soignée et d’origine inconnue.
D’autres éléments distillés avec parcimonie, qui s’ajoutent à des non-dits entre le père et ses enfants sur les sujets de fond, laissent imaginer un drame. Le réalisateur se garde pourtant bien d’émettre un quelconque commentaire accusant ou soupçonnant son père de quoi que ce soit. Mais le ver est dans le fruit : dès qu’on y a songé, impossible de continuer de regarder les images de fêtes d’anniversaire du père d’un œil attendri.
On a plutôt l’impression de se trouver devant un film de David Lynch, en pensant aux secrets qu’a peut-être emporté dans la tombe ce petit papy qui se plaignait innocemment de ses jambes qui ne le portent plus aussi bien qu’avant. La plus grande déclaration de Getting old stinks, c’est sans doute celle de Peter Entell à sa mère qui, elle, n’a pas pu savoir ce que ça fait de vieillir.