« Vers un avenir radieux » de Nanni Moretti : cinéaste au bord de la crise de nerfs

Revenant au registre semi-autobiographique qui a fait sa réputation, Nanni Moretti signe un film à la fois amusant et désabusé qui souligne avec autodérision son côté désuet tout en continuant à vouloir croire 
en un monde meilleur.


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Cinéaste italien majeur, notamment vainqueur de la Palme d’or en 2001 avec La Chambre du fils, Nanni Moretti semblait avoir perdu de sa verve lors de l’accueil contrasté en 2021 de son pesant drame choral Tre piani. Visiblement conscient de son image un peu désuète, le réalisateur, qui fêtera ses 70 ans au mois d’août, décide de reprendre des couleurs avec ce nouveau film, dans lequel il se livre au style semi-­autobiographique qui l’a rendu si populaire au début de sa carrière et lui a valu son premier grand succès avec Journal intime. 

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Moretti incarne ici le rôle de Giovanni, cinéaste italien renommé qui s’apprête à tourner une fresque politique située en 1956, lors de l’invasion soviétique en Hongrie, dans le but de rappeler que le Parti communiste italien aurait dû à l’époque se détacher de l’Union soviétique. Mais Giovanni découvre que ces évènements anciens n’intéressent pas du tout la jeune génération. Et les problèmes vont s’accumuler pour ce cinéaste de plus en plus dépassé : son couple entre en crise lorsque son épouse (l’excellente Margherita Buy) va voir un psychanalyste, sa fille tombe étrangement amoureuse d’un sexagénaire polonais et son producteur français (Mathieu Amalric) se révèle être un escroc qui fait peser un danger sur l’existence du film de Giovanni. 

Cultivant un ton mi-amusé mi-atterré, Moretti brocarde une époque dans laquelle les plateformes comme Netflix formatent le goût du public et où l’attrait pour les thrillers violents a de quoi désespérer les vieux cinéphiles. Mais il garde une belle vitalité dans la peinture de sa petite troupe de personnages et continue à filmer tendrement Rome (où les balades à trottinettes ont remplacé les virées à mobylettes de Journal intime). Moretti réaffirme surtout son amour d’un cinéma poétique et lumineux, entre autres dans les séquences où il montre un cirque hongrois qui rappelle l’œuvre de Federico Fellini. En inlassable passeur de l’histoire du cinéma italien, le cinéaste conserve ainsi sa croyance dans le pouvoir qu’a le septième art de réenchanter le monde et de combattre la tristesse d’une époque qui donne pourtant bien des raisons de déchanter.

Vers un avenir radieux de Nanni Moretti, Le Pacte (1 h 36), sortie le 28 juin

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