Paloma : « J’assume à 2 000 % ma passion pour ‘‘Les Visiteurs.’’ Je peux le réciter les yeux fermés »

Alors que la saison 2 de Drag Race France débute ce 30 juin sur France·tv slash (🎉), on reposte le questionnaire cinéphile de Paloma. L’irrésistible drag rousse, grande gagnante de la toute première saison, y évoquait son amour pour Almodovar, Valérie Lemercier ou encore Emmanuelle Béart.


003eeefc 3746 45bd a2be 7dc89b3115b3 rpdr paloma 7098 min

Cet article a été publié en août 2022.

Elle a remporté la première saison de l’émission Drag Race France, diffusée cet été sur France.tv Slash et France 2. Derrière l’irrésistible drag rousse se cache le malicieux Hugo Bardin, Clermontois de 31 ans qui est aussi – on le sentait à ses références pointues essaimées au fil des épisodes – scénariste, acteur et réalisateur. On lui a naturellement fait passer notre questionnaire cinéphile.

Décris-toi en 3 personnages de fiction.

Le personnage de Maggie Smith dans Gosford Park de Robert Altman. C’est à la fois Paloma et Hugo : une vieille anglaise cynique sarcastique à longueur de journées, ça me va bien. Dominique Blanc dans Milou en mai, de Louis Malle. C’est mon film préféré, le meilleur de Louis Malle, le personnage est bouleversant et c’est l’un des meilleurs rôles de Dominique Blanc. Et puis je suis fan des personnages lesbiens au cinéma. J’adore ce personnage, qui est souvent oublié dans la liste des butchs au cinéma. Et je ne peux pas ne pas citer Patsy Stone par Joanna Lumley dans la version anglaise d’Absolutely Fabulous. Il y a toujours un peu de Patsy dans Paloma.

Tes 3 outfits préférés au cinéma ?

Le premier, c’est le choc ultime de mon enfance, Emmanuelle Béart dans 8 femmes. J’aime les costumes de soubrettes. Emmanuelle Béart dans 8 femmes est habillée par Pascaline Chavanne, qui s’est inspirée d’un autre costume qui m’obsède, celui de Jeanne Moreau dans Journal d’une femme de chambre de Luis Buñuel. Le côté contrainte et les détails dans le costume, ça raconte plein de choses sur le personnage sans explication, je trouve ça hyper beau. J’ai une obsession pour les personnages de domestiques au cinéma depuis que je suis enfant. Ils sont souvent tout petits dans les scénarios et on peut faire tellement de choses avec…

Je rêverais de jouer une femme de chambre ou un valet. Tous les costumes de Victoria Abril dans Kika de Pedro Almodovar. C’est du drag, franchement. Almodovar, période années 1980, 90 et 2000 a beaucoup inspiré Paloma. Autant dans la vie, j’ai tendance à m’habiller comme Kristin Scott Thomas dans Quatre mariages et un enterrement, autant j’aime que mon drag soit hyper coloré, cartoon, avec un truc sixties ou eighties. Et puis la robe d’Isabelle Adjani dans La Reine Margot quand son frère meurt et qu’elle le prend dans ses bras, le sang de son frère et, symboliquement, celui des protestants vient s’imprimer sur sa robe blanche. J’adore.

3 personnages de drags légendaires ?

Tootsie dans le film de Sydney Pollack. Pour moi c’est le meilleur personnage qui ait été fait au cinéma, et puis joué par Dustin Hoffman, un acteur hétérosexuel. Le personnage de Bernadette joué par Terence Stamp dans Priscilla, folle du désert. Bernadette a une histoire d’amour avec le pompiste qui répare le bus, je trouve ça trop touchant. C’est un petit gros, il n’a pas un physique classique, elle c’est une femme trans un peu âgée.

L’histoire d’amour est assez sous-développée dans le film, ça m’a donné envie de reprendre cette idée dans mon court métrage, Paloma [visible jusqu’au 26 septembre sur le site de France.tv, voir ci-dessous, ndlr]. Et le héros de Torch Song Trilogy, que je connais par cœur, que j’ai joué au théâtre. La scène d’intro où il parle face caméra, en se maquillant, où il raconte sa vie, son ancien amant qui était malentendant et à qui il parlait en langage des signes… cette scène est parfaite.

Le film que tu regardes toujours à 3h du matin, les nuits d’insomnie ?

Alors là, on va changer de registre mais j’assume à 2 000 % ma passion pour ce film, c’est Les Visiteurs de Jean-Marie Poiré. Sans mentir, j’ai dû le voir à peu près 600 fois. Je peux le réciter les yeux fermés du début à la fin. Chaque réplique, chaque mot me fait rire. Ce que j’aime, dans les comédies, c’est le rythme et surtout les dialogues. Dans ce scénario tout particulièrement, le vocabulaire est hilarant. Même l’utilisation du mot « chou-fleur » me fait rire. Je continue de le voir, surtout avec ma meilleure amie. Parfois, quand on bricole ensemble, on ne le regarde pas mais on l’écoute et on rit.

L’acteur ou l’actrice dont tu étais amoureux à 13 ans ?

Je ne vais pas dire « amoureux » parce que les acteurs et les personnages masculins ne m’ont jamais intéressé. Du coup je ne vais pas parler d’un amour charnel, mais d’un amour spirituel. Depuis que j’ai 11 ans, c’est Emmanuelle Béart. J’aime tous ses films, même ses erreurs. Elle me bouleverse. Elle incarne un truc qui me plaît énormément, je vois l’actrice qui est géniale, mais qui est victime du regard des hommes, de l’image qu’on a voulu lui donner et qui, malgré tout, amène un truc hyper tragique. Justement à cause de ça, elle a toujours un truc terrible dans le regard. Dans Une femme française par exemple, un film peu connu, je pourrais le regarder à l’infini. Elle me bouleverse, je pourrais pleurer tellement je l’aime. Je suis très cinéma français, j’adore Catherine Deneuve – amour inconditionnel -, Delphine Seyrig et Jeanne Balibar.

3 cinéastes, mort(e)s ou vivant(e)s, avec qui tu rêverais de diner ?

Je vais faire un mélange atypique. Pedro Almodovar, Agnès Jaoui et Valérie Lemercier. Je sais qu’Agnès Jaoui aime beaucoup Almodovar, que Valérie Lemercier aime beaucoup Almodovar ET Agnès Jaoui, que Pedro Almodovar adore Valérie Lemercier. Donc ils devraient s’entendre. Moi, ce sont mes icônes. Almodovar, c’est lui qui m’a donné envie de faire du cinéma. Agnès Jaoui m’a donné envie d’écrire et de jouer – je parle des films qu’elle a faits avec Alain Resnais et des années 1990-2000. S’il y avait une scénariste à qui j’aimerais ressembler un peu, c’est elle. C’est toujours vers elle que je me tourne quand j’ai besoin d’inspiration. J’aime sa manière de parler des gens.

Et Valérie Lemercier, si j’avais un semblant de plan de carrière dans ma vie, ce serait le sien. J’aime le fait qu’il y ait un truc désuet dans sa manière de vouloir faire du cinéma et qu’elle soit jusqu’au-boutiste à l’absolu, au point de peindre elle-même un papier peint. Et elle me fait hurler de rire chaque fois qu’elle ouvre la bouche. Je pense que je ne parlerais pas beaucoup pendant ce dîner, je serais très observateur. Mais ça serait mon dîner idéal.

Portrait : © Jean Ranobrac / FTV