« Noël et sa mère » : ni avec ni sans toi

L’écrivain Arthur Dreyfus réalise un premier long métrage documentaire aussi drôle qu’extrêmement émouvant sur la complexité et le mystère de l’amour et de la filiation, doublé d’une réflexion méta sur la part funèbre des images.


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« Ni avec toi ni sans toi ». C’est par cet énon­cé tragique que s’achève La Femme d’à côté (1981) de Truffaut – et son histoire d’amants passionnés… Michelle et Noël Herpe ne sont pas amants, ils sont mère et fils. Lui est historien de cinéma ; elle dit ne rien avoir fait d’autre dans sa vie que se marier et avoir des enfants. Entre eux, une impasse qui leur rend si difficile cette chose d’apparence simple : être ensemble. C’est d’ailleurs séparément qu’Arthur Dreyfus les filme d’abord. Dans un décor semblable à un confessionnal, tissu noir au mur et halo de lumière nimbant leur visage, ils se racontent et analysent leur rela­tion.

Plus tard, réunis sur un divan dans le même plan, ils écoutent et commentent leurs propres déclarations, donnant ainsi vie à une série de confrontations aussi cocasses que poignantes à propos des différentes lectures de leur vie commune. Sur cette scène psychanalytique, c’est l’indicible d’un amour inconditionnel qui essaye de se dire et qui se conjugue à une réflexion méta sur l’ambiguïté des images, la face cruelle des photographies d’enfance et leur supposé bonheur qui dissimule trop bien la tristesse à venir. C’est aussi l’itinéraire d’un ciné­phile qui s’écrit, ce « ciné-fils » dont parlait le critique Serge Daney, qui aura choisi le cinéma, « lieu où il fallait être », monde des morts et du passé, comme pour conjurer les blessures du vivant.

Noël et sa mère d’Arthur Dreyfus, Outplay (1 h 30), sortie le 15 décembre

Image (c) OUTPLAY FILMS