Abadan, 1980. Cette ville portuaire du sud de l’Iran abritant une raffinerie devient une cible de choix pour l’Irak de Saddam Hussein. Pendant près d’un an, les troupes du dictateur en font le siège. Ce moment particulier de la « guerre oubliée » a inspiré La Sirène à Sepideh Farsi, qui fait le choix de se mettre à la hauteur des yeux d’Omid, 14 ans, resté seul avec son grand-père après le départ au front de son frère. L’adolescent trouve alors un bateau abandonné et décide d’en faire une arche pour sauver sa famille…
La Sirène est né de contraintes. Interdite de territoire depuis la sortie de son film Red Rose (2015), Farsi n’avait aucun moyen de tourner sur place et refusait les effets spéciaux. L’animation lui a permis de contourner ces obstacles avec une aisance sidérante. Dès la scène d’ouverture, dans laquelle Omid lève les yeux pour arrêter un ballon de foot et aperçoit les avions de combat irakiens qui crachent leurs bombes, la cinéaste impose son sens du découpage et une identité visuelle extraordinaire.
Jouant d’une animation à l’ancienne et d’aplats de couleurs, Sepideh Farsi oscille entre la réalité crue de la guerre et une mise à distance poétique. Ses personnages intrigants esquissent en creux le portrait d’une société iranienne diverse qui se retrouve autour de ce qui demeure quand tout le reste a disparu : la culture.
La Sirène de Sepideh Farsi, Bac Films (1 h 40), sortie le 28 juin