LA SEXTAPE · Demi Moore, la femme visible dans « The Substance »

« Avez-vous déjà rêvé d’une meilleure version de vous-même ? » À la question frondeuse posée par « The Substance » de Coralie Fargeat, j’ai failli répondre à haute voix dans le cinéma : « Oui ! ».


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Certains jours pluvieux, si l’on me proposait une substance qui pouvait générer une version de moi plus jeune, plus belle et plus hot, comme Demi Moore, je ne serais pas très regardante sur ce qui est écrit en petit dans le contrat de ce pacte faustien.

« The Substance » de Coralie Fargeat, à corps ouverts

Il y a, en chaque femme, le résidu de la jeune fille qu’elle a été, qui la hante, comme ce poom poom short pailleté taille 34, relique d’une jeunesse à jamais perdue, rangé dans l’armoire, avec l’espoir fou de le reporter un jour. Plus qu’un film sur l’âgisme ou la misogynie de l’industrie du divertissement, The Substance porte sur cette haine de soi sourde et lancinante qui finit par nous éteindre, toutes, un peu, au fil des années.

Le génie de Coralie Fargeat est d’emballer cette thématique dans une forme criarde, pop, ludique, saturée de fesses rebondies et de petits seins en pomme qui s’agitent, d’en faire un flesh opera scandaleusement sexy et crowd pleaser. Lorsque les images outrancières s’estompent, notre petite musique intérieure infiniment plus sulfureuse surgit, à laquelle se superpose le souvenir du corps de Demi Moore nue, sublime et vulnérable, dans un éclairage cru.

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C’est ce corps vibrant, inattendu, d’une femme de 61 ans qui crée un trouble, et non celui de sa version jeune ultra sexualisée (Margaret Qualley). Demi Moore n’est pas n’importe quelle actrice. Le parcours de son personnage dans The Substance épouse les courbes de sa propre carrière : ascension fulgurante, zénith, puis marginalisation en raison de son âge. La nudité a toujours été pour elle l’occasion d’un bilan d’étape dans sa vie de star et de femme, une manière d’affirmer sa puissance ; que ce soit avec sa célèbre couverture de Vanity Fair enceinte, signée Annie Leibovitz, en 1991, puis avec celle de Harper’s Bazaar, à 56 ans.

Lorsque la créature hollywoodienne lisse et refaite laisse apparaître la femme, c’est toujours avec Demi une petite révolution. Sa nudité, à 61 ans, dans The Substance, déclenche un armageddon intime puissant chez les spectatrices. Elle nous rappelle que le corps d’une femme est beau, sensuel, émouvant, quel que soit son âge, si l’on sait le regarder. Et qu’il est peut-être l’heure de jeter le poom poom short, sans amertume.