Guled (Omar Abdi), père de famille et mari aimant, est fossoyeur. Dès les premières secondes, nous le voyons enterrer des corps. Parfois, quand les dépouilles manquent, il lui faut attendre devant l’hôpital du quartier pauvre de Djibouti dans lequel il vit que de nouveaux décès aient lieu pour que l’argent rentre. La transaction est aussi simple que ça : un corps, un tombeau.
Fasciné par cette entreprise funéraire, Khadar Ayderus Ahmed a tricoté une fiction autour de cette pratique très répandue, notamment en Somalie. L’image inaugurale donne le ton, car Nasra (Yasmin Warsame), la femme de Guled, est atteinte d’une lourde maladie, et seule une opération extrêmement onéreuse pourrait la sauver…
De cette mise en situation macabre, le cinéaste tire un film paradoxalement enveloppant. Sans occulter l’enjeu social de la misère dans laquelle vit cette famille, La Femme du fossoyeur se fait émouvant quand il assume sa part de mélo et qu’avec une grande sobriété de trait, avec cette légèreté mêlée de gravité des contes, il se consacre à l’étude sensible d’un bonheur conjugal intact, et plus largement à l’expérience du sentiment amoureux éprouvé ici par des personnages secondaires.
La Femme du fossoyeur de Khadar Ahmed, Orange Studio/Urban (1h22), sortie le 27 avril
Image: © Arttu Peltomaa/Bufo 2021