La comédie dépressive est un genre très sérieux, qui nécessite paradoxalement une grande douceur. Maha Haj l’a bien compris. Son héros Walid est un écrivain palestinien raté, qui vit à Haïfa, en Israël, avec sa famille. Il devient bientôt ami avec son voyou de voisin Jalal. De combines en combines, Walid reprend goût à la vie, à moins qu’il ne se serve de Jalal pour assouvir un projet secret…
Une fois posée cette trame de buddy movie, ce film étonnant navigue avec un équilibre grâcieux entre ironie noire et absurde tragique. Maha Haj construit les antagonismes de ce duo dans des cadres serrés et fixes – une rigueur chorégraphiée à la Elia Suleiman, qui laisse s’échapper de légers dérèglements comiques.
Un art du contrepoint qui fait aussi mouche grâce à une écriture où la confidence psychologique, venue abîmer l’image virile de ces deux hommes au foyer, rivalise avec des dialogues cyniques. Que cache cette affinité improbable ? La réponse est dans cette « fièvre méditerranéenne » du titre, qu’une médecin diagnostique au fils de Walid, victime de violents maux de ventre. Il s’agirait d’une maladie héréditaire, typique de la région. Dans le récit, elle est surtout le symptôme du mal-être identitaire d’une famille palestinienne qui ne trouve pas sa place en Israël. Le film effleure cette parabole politique sans s’y attarder, comme happé par l’ambiguïté d’une amitié qui culmine dans un final tchekhovien, où l’on découvre trop tard que Walid et Jalal se ressemblaient sans le savoir.
Fièvre méditerranéenne de Maha Haj, sortie le 14 décembre, 1h50, Dulac Distribution