Andreï Schtakleff (La Montagne magique, 2015) explore l’histoire intime et politique de Detroit, qui fut le berceau de la Motown et fut autrefois la réputée capitale de l’automobile.
Longs travellings sur les quartiers abandonnés, visite de maisons vides aux peintures délavées… Ce sont d’abord des images de cinéma qu’évoque la lente balade à laquelle nous invite le film : on reconnaît les espaces désaffectés d’Only Lovers Left Alive de Jim Jarmusch. Nos guides, des habitants souvent âgés, nous parlent de ces ruines en les repeuplant de leurs souvenirs, en chargeant l’atmosphère de leur révolte.
Schtakleff montre comment les politiques d’urbanisme et l’économie se sont intriquées pour défavoriser et exclure la communauté noire ouvrière à travers des pratiques édifiantes – comme celle des promoteurs immobiliers qui rachetaient à bas prix les maisons des Blancs pour les revendre très cher aux Noirs.
L’histoire de la ville est alors mise en perspective avec celle des combats pour les droits civiques et syndicaux dans le contexte de désindustrialisation de la deuxième partie du XXe siècle. Mais le cinéaste insiste avec force sur la manière dont ceux qui sont restés poursuivent la lutte et finissent, malgré le manque d’aides publiques, par ranimer leur quartier.
Detroiters d’Andreï Schtakleff, DHR/À Vif Cinémas (1 h 26), sortie le 4 mai
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