« Danser sur un volcan » de Cyril Aris : scénario catastrophe

[CRITIQUE] Journal de bord d’un tournage en plein Beyrouth dévasté, le documentaire de Cyril Aris rend hommage au cinéma et à sa fabrication comme force de thérapie collective. Et signe un grand film sur l’intranquillité du monde qui vient.


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En juillet 2022 sortait Costa Brava, Lebanon, premier long métrage de la Libanaise Mounia Akl. Un drame sur l’exil d’une famille hors de la capitale, pour concrétiser son rêve d’ailleurs. Ce qu’on ne savait pas, c’est que le tournage lui-même fut soufflé par un Beyrouth à feu et à sang, dévasté par l’explosion au nitrate d’ammonium du 4 août 2020. À la pandémie du Covid-19 s’ajoutait ainsi blessés et immeubles détruits, une révolte urbaine sans précédent… Fallait-il alors tout abandonner ?

Conscient qu’il se joue là un événement, Cyril Aris, le monteur, s’empare d’une caméra pour filmer son équipe. C’est qu’il fallait bien un monteur pour superposer les couches de catastrophes, conjuguer par l’image un état du monde à un état du cinéma.

État pour le moins chaotique, qui résonne fort ; l’acteur Saleh Bakri est par exemple contraint à mille détours au seul motif qu’il détient un passeport palestinien. Vertigineux, ce tournage sisyphéen progresse à la force d’un optimisme rageur, emmené par les fous rires nerveux de la productrice Myriam Sassine.

Plus encore, la grave beauté du film tient à un constat : ce Liban enflammé, englouti par les crises économique et écologique, c’est aussi notre futur à tous. C’est la projection apocalyptique du monde qui vient ; un monde où l’ouvrage collectif, où l’association devront résister contre vents et marées. L’art n’y échappe pas, le cinéma encore moins. Sous ce constat terrible, une lumière pourtant : Costa Brava, Lebanon existe bel et bien. Lui et tous ceux qui suivront, dansant sur un volcan.

Danser sur un volcan de Cyril Aris (Les Films des Deux Rives, 1h27), sortie le 25 septembre