ARCHIVE : Quand Pasolini parlait de son engagement politique

L’écrivain, poète et cinéaste italien, connu pour la radicalité de son engagement, s’exprime sur l’indépendance et son rapport à la politique. Assassiné dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975, il aurait eu 100 ans ce week-end.


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« Je déteste l’intellectuel qui dit : ‘Je suis indépendant’ ». Au journaliste Jean Duflot qui lui demande, dans cet entretien de 1966 déniché sur le site de l’INA, pourquoi il se réclame de l’idéologie marxiste sans pour autant adhérer au système politique communiste, Pier Paolo Pasolini, fidèle à son esprit farouche, répond qu’il n’a jamais eu sa carte au Parti.

Pasolini souligne ainsi la posture hypocrite de certains intellectuels, qui se targuent d’être libres tout en échappant pas au conformisme de la pensée. Sans jamais s’inscrire sous le blason d’une quelconque institution politique, Pasolini n’a cessé de prouver son engagement à gauche, tant dans ses déclarations que dans ses films, aussi subversifs dans leur message qu’oniriques dans l’esthétique.

Révélé avec L’Evangile selon Saint Matthieu (1964), amèrement reçu par la gauche intellectuelle mais adoubé par le public, il enchaînera les longs métrages avec notamment le Décaméron (1071) ou Les Contes de Canterbury (1972), des récits médiévaux illustrés par des plans quasi surréalistes, comme tout droit sortis d’une peinture de Bosch.

« Théorème » de Pier Paolo Pasolini

MARXISTE, MAIS PAS ENCARTÉ

Dans cet entretien, le réalisateur poursuit : « J’accepte l’idéologie marxiste, qui dénonce des réalités sociales, et en grande partie dans l’idée d’apporter des solutions aux problèmes sociaux. Mais je ne partage pas complètement la politique du parti communiste italien, soviétique… »

Pas étonnant, de la part de celui qui a activement dénoncé l’embourgeoisement et le consumérisme grandissant des sociétés occidentales dans ses films satiriques, et qui écrivait déjà dans une correspondance avec la poétesse Giovanna Bemporad en 1947 : « L’autre est toujours infiniment moins important que le moi, mais ce sont les autres qui font l’histoire. »

« Salò ou les 120 Journées de Sodome » de Pier Paolo Pasolini