Il y a d’abord cette plage en 3D, baignée des rayons irisants d’une boule de feu au loin. Octave et Flora, deux amants qui ne sont jamais vus, ont pris des avatars, celui d’un chevalier futuriste et celui d’une déesse. Les deux marchent un peu au bord de l’eau, puis Octave propose une relation sexuelle à Flora – les avatars s’exécutent. La scène pornographique est captée par Pablo Dury avec un lyrisme fou qui dit toute la contradiction du virtuel : les amants sont à la fois ici et ailleurs, ensemble et séparés, charnels et désincarnés.
Flora dit à Octave qu’elle veut enfin le rencontrer en vrai mais celui-ci hésite, son visage à moitié brûlé l’inhibe. Il finit par dire oui, et ils se donnent rendez-vous dans un bois. Le cinéaste donne à la forêt obscure l’allure d’un songe mélancolique et obsédant. Les frontières de l’espace s’évanouissent dans la nuit pour esquisser une clairière de conte. Octave est tellement pétri de peur qu’il se tient sur ses gardes, et observe Flora dériver dans les ténèbres – habillée d’un chaperon rouge, on pourrait la croire en danger, prochaine proie d’un prédateur à l’affût.
Mais Pablo Dury tord le canevas narratif annoncé : Flora n’a pas peur. « Le soleil dort » mais c’est elle qui guide Octave, qui sait où est la lumière. Aussi ardent qu’à fleur de peau, le réalisateur la capte émanant des deux amants qui ont réinventé leur intimité sous une autre apparence. C’est toute la beauté de son film que d’être attentif à toutes les transfigurations rêvées de leur amour.