Inlassable explorateur de formes filmiques depuis plus d’un demi siècle, Barbet Schroeder consacre ici un documentaire à son ami peintre Ricardo Cavallo et épouse le mouvement créatif constant de cet artiste, que l’on découvre d’abord en Bretagne peignant dans la grotte de Saint Jean du Doigt (Finistère). Ressemblant à un aventurier fantasque au sein d’une nature luxuriante, le peintre franco argentin semble tout droit sorti d’un film de Werner Herzog tant Schroeder montre avec gourmandise son implication physique, alors qu’il porte son chevalet sur son dos et se déplace à travers la verdure.
Le film se penche ensuite de façon plus large sur l’histoire de la peinture au fil des siècles, dont Cavallo et Schroeder discutent dans divers lieux avec un enthousiasme digne de jeunes étudiants. Célébrant un rapprochement libre entre les œuvres et la mise en relation entre les individus à travers l’art, le cinéaste défend une vision décontractée de la transmission du savoir et esquisse un trajet original en nous faisant découvrir en cours de route le petit appartement de Neuilly dans lequel Cavallo fit ses débuts il y a plusieurs décennies.
Cette structure narrative propose ainsi un retour dans le temps, la curiosité du peintre constituant un touchant fil rouge qui continue à animer le présent. Ouvert à la spontanéité et revendiquant le principe d’un film en train de se faire (on aperçoit parfois l’équipe technique), Schroeder prend plaisir à observer sous toutes ses coutures ce protagoniste humble qui communique aussi son amour de l’art dans l’école gratuite pour enfants qu’il a créée en Bretagne.
Sorte de saint moderne à l’existence frugale tournée vers le partage, Cavallo affiche jusqu’au bout une candeur chaleureuse qui redonne un précieux espoir en la pratique artistique, à une époque au cours de laquelle les plus sombres penchants humains ressurgissent.
Ricardo et la peinture de Barbet Schroeder, Les Films du Losange (1 h 46), sortie le 15 novembre.