Durant l’hiver, les enfants d’un petit village turc suivent leurs cours dans le joyeux tumulte d’une salle de classe. L’été suivant, la jeune Hulya et son frère Ali explorent une forêt autour d’un cimetière. À la nuit tombée, leur famille endeuillée se regroupe autour d’un feu de camp pour converser sur les aléas de la vie… Dans son premier long métrage, Nuri Bilge Ceylan fait déjà dialoguer les deux pôles de son cinéma prolixe et contemplatif. D’un côté, les éléments naturels (le vent, le feuillage, les animaux) percent chaque scène ; de l’autre, le moindre dialogue est l’occasion de philosopher sur la tragédie que constitue le rêve désespéré d’une extraction de la ruralité.
« Les Herbes sèches » de Nuri Bilge Ceylan : au coeur de l’hiver
Une œuvre tantôt prosaïque, tantôt spirituelle germe dans ce film ouvert aux quatre vents. Dans une scène, une suite de gros plans sur les visages abîmés de la famille de Hulya fait respirer une longue conversation en forme de règlement de comptes entre deux cousins rivaux. Le premier est parti étudier à la ville puis à l’étranger ; le second n’a toujours pas trouvé sa voie après avoir effectué son service militaire. La grande force du cinéma de Ceylan est de rendre compte de ce déchirement par les moyens d’une mise en scène bicéphale, à la fois rigide et d’une grande souplesse.
Kasaba de Nuri Bilge Ceylan, Memento (1 h 24), sortie le 16 août