La cinéaste l’affirme dès le début du récit : Apolonia, Apolonia n’est à l’origine qu’un film de fin d’études. De fil en aiguille, le projet se sera finalement étalé sur plus d’une décennie durant laquelle Lea Glob a filmé les joies et les peines d’Apolonia Sokol, peintre passée par les Beaux-Arts. Excentrique et bohémienne, cette dernière semble née pour les caméras (elle dispose d’un film de sa propre naissance) et vit un quotidien tumultueux entre les murs d’un théâtre parisien transformé en refuge pour exilés politiques…
Mais un portrait peut en cacher un autre : en suivant Apolonia, Lea Glob capte aussi l’intimité d’Oksana Chatchko, cofondatrice ukrainienne du mouvement Femen que l’artiste héberge en France, en dépit des tentatives d’assassinat, et dont la figure, toujours fuyante et en mouvement, résiste de la même manière que son hôte à l’horizon de la fixité. Composite voire carrément cubiste dans son approche du montage, le documentaire est alors à l’image des tableaux que l’artiste peint durant ses études, portraits constitués de plusieurs couches et d’instants hétérogènes qui se superposent à la manière d’un bouquet temporel. L’histoire partagée d’Apolonia et d’Oksana est aussi celle d’un déplacement incessant et insaisissable, avec l’émancipation comme art de vivre et art de se mouvoir.