On vous prévient tout de suite : ce documentaire ne retrace pas la vie de Christophe (et heureusement, car on est persuadés que le « Beau Bizarre » aurait détesté ça). Il s’apparente plutôt à un bricolage sensible d’instantanés nocturnes, tout en suggestions. De 2002 à 2004, Ange Leccia et Dominique Gonzalez-Foerster ont suivi le chanteur blond aux lunettes bleues fumées dans l’effervescence de ses spectacles (notamment à l’Olympia), où il gérait tout de manière méticuleuse, ou l’intimité de son home studio du boulevard Montparnasse, avec son jukebox, des affiches de cinéma partout sur les murs, des pellicules éparpillées près des synthés, des piles de DVD – un beau bordel savamment organisé.
Ces observations pudiques et ludiques forment un portrait fragmentaire – paradoxalement très intimiste – du chanteur, dont l’image de « dandy beauf » a longtemps collé à la peau. Les cinéastes explorent à fond cette face extravagante et transforment de simples captations de shows musicaux en peintures vivantes (de très beaux ralentis colorés donnent aux interprétations passionnées de Christophe un aspect baroque).
Sorte de voyage dans une nuit éclairée par des spotlights, le documentaire dévoile aussi son côté naïf, enfantin (comme quand, en découpant le col de son t-shirt, il évoque le métier de sa mère, couturière, et montre fièrement son travail à la caméra), sa tendance à frimer comme à s’extasier devant des toiles ou des synthés. Preuve, comme Christophe en a toujours été convaincu, que c’est dans la nuit qu’on se révèle le plus.