« Cent Mille Milliards » de Virgil Vernier :

[CRITIQUE] Avec ce conte de Noël plein de spleen situé dans un Monaco aux airs préapocalyptiques, où les corps se consomment et les cœurs se consument, Virgil Vernier signe un nouveau joyau sensoriel sur fond de solitude ultra moderne.


cent mille milliards
« Cent Mille Milliards » de Virgil Vernier © UFO

Avec son style oscillant entre réalisme et onirisme (qui fit déjà merveille dans Mercuriales en 2014, ou Sophia Antipolis en 2018), Virgil Vernier n’a pas son pareil pour immerger ses personnages dans d’imposants décors à la froideur contemporaine et en extraire une émotion secrète. Le cinéaste suit ici Afine (Zakaria Bouti, magnétique), nonchalant travailleur du sexe de 18 ans, qui loue ses services dans la Principauté de Monaco. Durant les très calmes fêtes de Noël, le jeune homme traîne son vague à l’âme au côté de son amie Vesna (Mina Gajovic) et de l’adolescente qu’elle garde pendant les vacances, Julia (Victoire Song). Partageant une même solitude et une même mélancolie, les personnages mystérieux et touchants de cette fable de Noël atypique et préapocalyptique évoluent dans une atmosphère cotonneuse, témoins malgré eux de la construction du chantier d’extension de Monaco sur la mer formant un étrange horizon d’îles artificielles. Si la réalité du monde des ultrariches et de la lutte des classes est palpable, Vernier s’appuie aussi sur une photographie soyeuse qui maintient l’espoir d’une issue de conte de fées. Une délicatesse qui atténue momentanément la brutalité d’une époque durant laquelle les cœurs tendres finissent souvent par se heurter à des miroirs aux alouettes.

Cent Mille Milliard de Virgil Vernier, sortie le 4 décembre, UFO (1 h 17)