Après le thriller, la chronique sociale, le film d’anticipation, le réalisateur va explorer un genre qu’il n’avait jusqu’ici jamais exploité : la comédie musicale. Mais attention, ne vous attendez pas à un musical classique…
Décidément, le cinéaste sud-coréen ne fait rien comme les autres. Il ne réalisera pas de films de super-héros – non pas parce qu’il considère qu’il s’agit d’une industrie conformiste à la qualité artistique douteuse voire inexistante (coucou Martin Scorsese), mais parce qu’il a une phobie des costumes moulants. Alors, forcément, quand Bong Joon-Ho déclare à Empire qu’il aimerait une comédie musicale, on se doute un peu qu’on n’aura pas droit à un remake de The Star is Born ou à un La La Land bis, n’en déplaisent aux puristes de la chansonnette. Au contraire, le cinéaste compte bien dynamiter de l’intérieur les codes du genre, jouer avec les attentes du spectateur pour les mieux les décevoir, tromper notre imaginaire collectif :
« J’adorerais faire une comédie musicale », a-t-il déclaré (jusqu’ici, tout va bien). Les personnages commenceraient à chanter, puis se diraient « Oh mon Dieu, merde, c’est trop ringard », et s’arrêteraient soudainement. Il y a des films musicaux étonnants, comme Chantons sous la pluie. Mais quand je les regarde, je me sens très gêné et je commence à rougir. Il faudrait donc que ce soit… différent ».
À LIRE AUSSI >> 20 films sud-coréens à (re)voir après « Parasite » de Bong Joon-ho
On comprend là qu’avec Bong Joon Ho, la comédie musicale ne sera pas une parenthèse enchantée pleine de guimauve dégoulinante, un utopique microcosme servi par des paroles mièvres ni une histoire d’amour idyllique, mais un film méta et distancié, voire ironique (il maîtrise le rire grinçant) qui examine ses propres ressorts narratifs pour nous conduire vers un chemin de traverse plus singulier. Bref, une comédie musicale anti-musicale – l’oxymore est aussi étrange qu’elle résume à merveille le travail de Bong Joo Ho, qui a toujours fait semblant de s’inscrire dans des formules traditionnelles, de correspondre à un genre particulier, pour s’éloigner de ces contraintes.
À LIRE AUSSI >> La liste du jour : les 30 films préférés de Bong Joon Ho
The Host commençait comme un film de monstre pour se déployer en fresque familiale inter-générationnelle ; Snowpiercer se présentait sur le papier comme un film de survie post-apocalyptique avant que l’on comprenne, sidérés, qu’il s’agissait d’une parabole sur les clivages sociaux d’un pays inégalitaire. Et, bien-sûr, Parasite était loin d’être seulement un thriller hitchcockien, déployant une myriade de références qui complexifiaient tant sa forme hybride que son propos politique… On croise les doigts pour que Bong Joon Ho recrutent Ryan Gosling et Emma Stone pour le casting de cette anti-comédie musicale -on le sait capable de ce clin d’oeil ironique.
Image: Capture d’écran Youtube