Ce film est disponible gratuitement jusqu’au 16 février.
Entre 1965 et 1978, le journal filmé de Romain Goupil, fils du célèbre chef opérateur Pierre Goupil, se concentre sur le quotidien de militants d’extrême gauche. Avec des images d’archives en noir et blanc, le documentaire, sacré Caméra d’or au Festival de Cannes en 1982 (et le César du meilleur premier film en 1983, cérémonie qu’il compare à l’époque à une « fête minable de patronage, sponsorisée par l’industrie »), retrace l’amitié et les aventures de Romain Goupil et de Michel Recanati, militant du CAL (Comité d’action lycéen), qui s’est suicidé à l’âge de 30 ans. Un film sur la jeunesse, les utopies et les désillusions qui en découlent.
Romain Goupil a filmé caméra au poing les frasques de sa bande de copains et, plus tard, ses années d’activisme. Il a agencé ses images pour en faire un témoignage rare sur la révolte de mai 68 et les événements qui l’ont suivie. Produit par Marin Karmitz (fondateur de mk2, société éditrice de TROISCOULEURS), qui a présenté Jean-Luc Godard à Goupil, ce bouleversant portrait d’une génération a été filmé avec le reste de pellicule de Sauve qui peut (la vie), réalisé en 1979 par Godard.
De sa voix nasillarde en off, le réalisateur retrace son amitié indéfectible avec ses amis d’enfance, Coyote et Baptiste, leurs premiers films ensemble, leurs premiers pas dans le militantisme d’extrême-gauche, son exclusion du lycée à cause d’une grève qu’il avait initiée – seule sa mère l’avait alors soutenu -, sa difficulté à s’investir dans des relations avec des femmes, lui qui était alors davantage intéressé par la politique… Avec, toujours, la présence fantomatique de son ami et militant Michel Recanati, dont la trajectoire tragique se dessine en filigrane : au fil des ans, il s’est fondu tout entier dans le militantisme, jusqu’à disparaître.
À l’arrivée, ce premier long de Goupil, qui mêle images d’archives, bouts de courts métrages et interviews de militants et amis de l’époque, est un passionnant témoignage sur la construction du militantisme (jusque dans ses affres : ses guerres internes, ses batailles d’ego) mais aussi sur celle d’une certaine masculinité (à l’intérieur de cercles d’étudiants politisés essentiellement masculins, dans lesquels les femmes sont reléguées aux rôles de cuisinières ou d’amoureuses fascinées et passives).