Avant de jouer une adolescente cannibale en proie à ses désirs dans l’horrifique Grave, premier film à la fois gore et fun de Julia Ducournau, Garance Marillier avait collaboré avec la réalisatrice sur son premier court-métrage, Junior, dans lequel la bestialité de son visage enfantin irradiait déjà l’écran. L’actrice y incarne Justine, dite Junior, treize ans, garçon manqué un brin misogyne, le visage recouvert de bouton, à qui on diagnostique une gastroentérite fulgurante
Nettement moins sombre et vampirique que Grave, ce teen enjoué mobilise pourtant les motifs qui obsèdent la réalisatrice : la métamorphose corporelle et monstrueuse comme symbole des changements hormonaux et de la sexualité en éveil, l’humour acide, les dialogues ciselés et le regard aussi tendre que cruel sur un âge instable…
Grâce à un sens du rythme impressionnant, qui alterne séquences de comédie vivaces et plans anxiogènes, Julia Ducournau fait vriller à chaque instant le quotidien vers l’angoisse, le bizarre, comme si son personnage était tiraillé entre la légèreté et la peur de grandir. Aux motifs traditionnels du teen-movie – les repas collectifs à la cantine filmés comme un jeu de ping-pong verbal, les moments de rébellion en classe qui évoquent Les Beaux Gosses de Riad Sattouf – se greffe un véritable travail sur le son pesant, la lumière déclinante, la menace hors-champ, qui donne à ce court-métrage un charme insolite, aussi mystérieux que les voies du désir adolescent.
Julia Ducournau : « Je voulais faire sentir que la féminité est une forme d’hybridité »