« Whiplash » de Damien Chazelle : l’art comme sacerdoce

Centré sur la relation néfaste entre un jeune batteur ambitieux et un prof de musique ultra perfectionniste, le premier long métrage de Damien Chazelle impressionne par sa puissance et son jusqu’au-boutisme. Un film viscéral à revoir sur France TV en ce moment.


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Difficile, quand on rencontre Damien Chazelle, d’imaginer qu’il est bien l’auteur de ce film torturé et violent. Dans un français quasi parfait, ce jeune Américain bien dans sa peau a des airs de gendre idéal. « Je me suis battu pour faire ce film. J’avais besoin de raconter cette histoire, qui est en réalité la mienne. Ce prof m’a dégoûté de la batterie. J’en faisais des cauchemars. Je voulais raconter ça, comment quelqu’un peut, à un moment, prendre possession de votre esprit. Le film m’a servi d’exorcisme. » Intense, et très intime donc, Whiplash décrit de manière extrêmement sensorielle la dévotion d’un jeune homme (Miles Teller) pour son art.

Mais, insidieusement, le film nous amène à nous interroger sur la valeur et le sens de ce sacrifice. La quête de réussite et d’accomplissement justifie-t-elle tout ? Dans la lignée des grands films sur le dépassement de soi des années 1970-1980 comme Rocky ou Flashdance, Whiplash est un film ambigu qui oscille entre la virtuosité de la mise en scène et le voyeurisme torve du sadisme des situations. « Je n’ai pas envie de décider pour le public. C’est à lui de savoir si le prof a raison ou non de pousser le héros jusqu’au bout. Pour moi, c’est quelque chose de très américain. Tu veux quelque chose, mais es-tu capable de tout faire pour y arriver ? C’est le versant sombre du rêve américain auquel on est souvent confronté. » Ironiquement, c’est bien ce rêve américain que vit Chazelle, grâce au succès public et critique de ce premier long métrage retors.

Image (c) Ad Vitam

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