Vu au festival de Brive : « Marinaleda », le film de vampires dandy de Louis Séguin

Avec « Marinaleda », le cinéaste Louis Séguin réanime le mythe du vampire avec élégance, dans un versant absurde et sensuel.


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Faire simple. Deux vampires en virée sur les routes de France cogitent là-dessus. Et c’est cette simplicité, ce dépouillement, qui font toute la beauté du film de Louis Séguin. Avec drôlerie, son film de vampires se désencombre du spectaculaire propre au genre – les manoirs, les cercueils, les grandes scènes de frisson – pour réinventer la figure du vampire, retrouver son innocence, presque sa candeur.

Le cinéaste joue bien avec le suspense, mais sans que l’on attende forcément la prochaine proie des suceurs de sang : on tente plutôt d’anticiper la prochaine rupture de ton, la dissonance suivante. Tout est affaire de rythmes dans Marinaleda : c’est en donnant à l’élocution des deux vampires cette distinction calme, une sorte d’indolence dandy, que les acteurs Luc Chessel et François Rivière font sentir leur inadaptation au monde.

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Car leurs personnages claudiquant souffrent de solitude, c’est même pour ça qu’ils sont sur les routes, et qu’en quête d’utopie ils prennent pour cap Marinaleda, un village andalou autogéré par ses habitants. En attendant, Louis Séguin les filme dans des lieux standardisés, anonymes, dont il sait tirer toute l’étrangeté, comme les espaces de convivialité bien glauques des aires d’autoroute – des zones d’effacement reflétant leur condition errante, sans âge.

Jusqu’à ce qu’ils tombent sur Lise (Pauline Belle), une automobiliste pas farouche qui les prend en stop et les invite chez elle sans trop s’inquiéter. C’est là que la sensualité propre aux vampires est réimpulsée. Lise pose tout un tas de questions à ses convives autour de quelques verres de vin (et de sang) et commence alors un marivaudage voluptueux, un jeu de discours quasi rhomérien, intimiste et cru, glissant de l’esquive à l’épanchement. Dans cette rencontre, les deux vampires trouvent une utopie qu’ils n’avaient pas imaginée. Ce n’est pas plus compliqué que ça.

Image (c) Hippocampe Productions

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