Dans la ville géorgienne de Koutaïssi, un homme et une femme tombent subitement amoureux l’un de l’autre lorsqu’ils se croisent devant une école. Mais, aussitôt, un mauvais sort les frappe et modifie leur apparence au point de les empêcher de se reconnaître. Avant que leur métamorphose opère à l’écran, un carton nous enjoint à fermer les yeux pendant quelques secondes. Avec gourmandise, le cinéaste nous invite ainsi à croire au réalisme magique et à se laisser prendre par la main dans les méandres de son récit.
Avec la transformation des amoureux, c’est le film lui-même qui mute. Il passe de la romance à une balade douce et erratique, dans des quartiers aux accents de fête foraine joyeuse et surannée, sur fond de Coupe du monde de foot, hommage aux symphonies urbaines du cinéma muet. Après le sortilège, le malheureux ne peut plus s’adonner à sa passion du ballon rond : il cède à regret sa balle aux enfants du quartier qui prennent alors les rênes du récit, entraînant le film sur un chemin buissonnier. Il faudra de la patience et le hasard du tournage d’un film dans le film pour que l’histoire retrouve son cours initial, grâce à deux cupidons incarnés par les parents du réalisateur, dans une parfaite mise en abyme de ce beau conte poétique.
Sous le ciel de Koutaïssi d’Alexandre Koberidze, Damned (2 h 31), sortie le 23 février
Image (c) Faraz Fesharaki/DFFB