De Grâce
De Grâce (c) Alexandra Fleurantin
La claque de cette édition de Séries Mania nous vient du Havre. C’est dans la ville portuaire et ses fameux docks que s’ancre De Grâce, produite par la chaîne Arte, qui devrait la diffuser à l’automne. Pierre Leprieur, ancien docker à la retraite, a fait de la lutte contre le trafic de drogues qui menace toute sa corporation le combat d’une vie. Mais celle-ci bascule lorsque ses deux fils sont interpellés et soupçonnés de se livrer eux-mêmes à des activités illégales. Le réalisateur Vincent Maël Cardona, auteur du très beau Les Magnétiques sur grand écran, prouve ici que sa patte personnelle est suffisamment puissante pour être apposée sur un projet qu’il n’a pas lui-même écrit. Sculptée de clairs-obscurs, ressemblant tantôt à un western urbain tantôt à un Parrain hexagonal, portée par des comédiens chevronnés géniaux (Olivier Gourmet, Astrid Whettnall, Pierre Lottin) ou moins chevronnés mais tout aussi géniaux (Panayotis Pascot), De Grâce est une réussite sur toute la ligne.
« Les Magnétiques » : dans le juke-box des eighties
Best Interests
Best Interests (c) Chapter One Pictures
Sur le papier, il y a tout pour que Best Interests soit un drama britannique réussi. Un sujet douloureusement actuel, d’abord. Andrew et Nicci, les parents de Marnie, lourdement handicapée, se déchirent sur la décision à prendre lorsque les médecins leur conseillent de stopper les soins de leur jeune fille. Un showrunner prestigieux, ensuite. Jack Thorne a travaillé sur Skins et Shameless, avant de créer la fabuleuse mini-série The Virtues, preuve qu’il s’y connaît en histoires qui tapent au ventre. Des acteurs fantastiques, enfin. L’Irlandaise Sharon Horgan, plus connue pour ses comédies (Catastrophe, Bad Sisters) et le caméléon Michael Sheen, se font face pendant l’implosion. La série que la BBC diffusera en juin étant sous embargo, on ne peut guère en dire plus, sinon que si elle figure ici, c’est qu’elle est à la hauteur de ces (grandes) attentes.
« The White Lotus » : satire sous le soleil italien
Polar Park
Polar Parl (c) Séries Mania
Voilà douze ans qu’on n’avait pas revu le réalisateur Gérald Hustache-Mathieu. La dernière fois, c’était au cinéma, en 2011, avec l’étonnant Poupoupidou. Douze ans plus tard, il renoue avec ses obsessions pour sa série Polar Park. Celle-ci met en scène les mêmes personnages, l’écrivain David Rousseau (Jean-Paul Rouve) et le gendarme Bruno Leloup (Guillaume Gouix), qui enquêtent les pieds dans la neige de la ville la plus froide de France (Mouthe) sur – et ça c’est une nouveauté – des meurtres maquillés en tableaux. Le premier tente aussi de résoudre un mystère familial dans un monastère. Le résultat est un monument d’humour pince-sans-rire. Hustache-Mathieu est capable de faire surgir le comique d’un improbable alignement de mots comme des interstices du drame. Il est également capable d’empreindre sa série d’une identité visuelle forte, servie par une mise en scène ciselée, que l’on pourra découvrir probablement vers la fin de l’année 2023 sur Arte.
« Yellowjackets » : un survival psychologique palpitant
The Fortress
The Fortress (c) Séries Mania
Dans un futur proche, la Norvège s’est adonnée à l’une des grandes idées trumpistes du XXIe siècle : construire un mur pour la séparer du pays voisin (la Suède, donc) et éviter toute invasion. Il faut dire que les ressources sont rares, les maladies se propagent, et le pays est devenu une sorte de paradis autosuffisant dans lequel on peut encore manger des tomates fraîches. Devant le mur, des réfugiés se massent dans des bidonvilles en espérant un jour décrocher le droit d’asile. Derrière, le Premier ministre nationaliste mise sur sa réélection. Jusqu’à ce qu’une épidémie se fraie un chemin à travers le mur et menace la survie de ce petit monde autarcique. Dans la droite de ligne de la terrifiante Years and years (dont elle reprend d’ailleurs l’acteur Russell Tovey), The Fortress est de ces dystopies très efficaces, d’autant plus flippantes qu’elles ne poussent pas les curseurs très loin. Toutes les graines sur lesquelles pourrait germer ce monde infernal (vidéosurveillance, fichage, xénophobie) sont déjà bien plantées.
Aspergirl
Aspergirl (c) Lou Faulon